CAÏN
(hébreu Kayin). Ce nom, de par sa racine, veut dire artisan,
ouvrier, forgeron. Il évoque l'effort de celui qui compte sur son
habileté et sur sa persévérance pour exécuter un travail et en tirer
sa subsistance. Il convient à merveille pour désigner l'humanité
laborieuse, en marche vers la royauté de la force. Le rapprochement
établi par Ge 4:1 entre le nom de Caïn et l'idée d'acquisition,
de formation, n'est qu'un jeu de mots populaire, sans valeur
étymologique. Le cadre historique, dans lequel le récit de notre
narrateur fait évoluer Caïn, suffit à «montrer qu'il ne s'agit pas
ici d'un fils du premier couple humain mais d'un personnage typique
(voir Chute). On a voulu voir dans Ge 4:11-17 deux Caïn
différents, l'un errant, ancêtre éponyme des nomades arabes, l'autre
ancêtre d'une tribu sédentaire agricole, à laquelle remonterait le
commencement de la vie sociale, de la construction des cités, etc. On
a conjecturé aussi, à cause du rapprochement des termes, que Caïn
représente les Kéniens (No 24:22,Jug 4:11). Rien de tout cela
n'est justifié par les textes, dont l'unité saute aux yeux et dont la
préoccupation n'est nullement ethnique, mais simplement d'ordre
religieux.
Autour du nom de Caïn, maudit de la terre mais non pas de Dieu
qui, au contraire, en même temps qu'il le châtie, lui accorde son
assistance miséricordieuse (signe protecteur: Ge 4:13,16), sont
groupés les événements relatifs aux terribles effets de la chute, à
la valeur sacrée de la vie humaine, à la sainteté morale de Dieu, à
la misère de l'homme livré à ses seules forces, et par-dessus tout
est mise ici en lumière cette vérité qui ne sera que trop démontrée
par l'expérience des siècles, à savoir que le résultat du péché est
une disposition à se laisser aller sur la pente et à multiplier les
actes mauvais (Ge 4:7 b). Avant d'abandonner à ses propres voies
l'humanité qui l'a refusé pour guide, Dieu la remet aux directions de
sa conscience et l'avertit que son bonheur dépendra désormais de son
effort de volonté à fuir le mal (verset 6 et 7a). C'est bien le cas
de rappeler ici le va soli de l'Ecclésiaste (Ec 4:10) et
l'apostrophe du Messie aux Juifs qui l'avaient repoussé: «Vous n'avez
pas voulu...Maintenant votre demeure va vous être abandonnée, c'est à
vous d'y pourvoir!» (Mt 23,Lu 13). Alex. W.