VAIN, VANITÉ

Du mot latin vanus, qui pourrait avoir la même origine que
vacuus =vide. C'est bien là le sens primitif: la vanité c'est le
vide, l'illusion, le manque de valeur ou de vérité, puis, par
dérivation, le faux orgueil, la sotte glorification injustifiée, la
fatuité. Rien de vide comme un être humain plein de soi. Pour ce
sens, le plus fréquent aujourd'hui du mot vanité, voir Orgueil. C'est
surtout dans le premier sens que l'emploie la Bible, et nos versions
modernes le traduisent parfois autrement pour éviter la confusion
avec le second sens. Nous suivrons ici les termes originaux.

I Ancien Testament.

1.
L'hébreu hèbèl =souffle, vapeur, est l'image de
l'éphémère et de l'illusoire, très fréquente dans les Psaumes (Ps
31:7 39:6), dans Esaïe (Esa 30:7), quoique parfois le mot garde
son sens propre (ex.: Esa 57:13) dans Job (Job 9:29) et
surtout dans le livre de l'Ecclésiaste (voir ce mot); celui-ci
l'emploie plus de 40 fois (Ec 1:2,14 12:10 etc.), en fait le
thème de ses réflexions désabusées et condense dans le superlatif:
«vanité des vanités», et dans l'observation pessimiste: «tout est
vanité», sa conviction que la vie, avec toutes ses apparences et ses
promesses mal tenues, n'est qu'illusion et déception. En un sens plus
étroit, hèbèl s'applique à des coutumes coupables comme
l'idolâtrie (De 32:21,Jer 2:5 16:19), et se traduit alors plutôt
par péché (1Ro 16:13,26) ou par néant (Jer 10:15).

2.
Le mot châv comporte un sens plus nettement moral:
ce qui est mal. C'est lui qui apparaît dans le troisième
commandement: prendre le nom de JHVH «en vain», litt, pour la vanité
(Ex 20:7,De 5:11; il est peu probable que le sens primitif de
cette expression soit, comme certains l'ont cru, «avec les mains
vides»: ce sens, dans Ex 23:15, est donné par un autre terme
hébreu [v. Décalogue]). Presque partout ailleurs châv représente
péché, iniquité, tromperie (Job 7:3,Ps 12:2 24:4,Esa 1:13 etc.).

3.
Le mot rîq désigne le vide, l'inutile (Ps
4:3,Le 26:16,20).

4.
Enfin âven, dont l'idée première est celle de
trouble, représente quelquefois la vanité (Esa 41:29,Zach,10:2),
mais plus souvent l'iniquité et spécialement celle de
l'idolâtrie (1Sa 15:23,Job 15:35,Ps 10:7,Os 12:12 etc.).

II Nouveau Testament.

1.
Le grec du N.T. emploie surtout l'adjectif kénos =vide,
qui déjà dans les LXX rend les principaux des termes hébreux
précités. Essentiellement négatif, il exprime la non-valeur, celle
d'un projet (Ac 4:25), d'une prédication, d'un discours (Eph
5:6,Col 2:8), d'une certaine foi (1Co 15:10,14,58) Eïs zénon
=en vain, équivaut à: pour rien (2Co 6:1,Ga 2:2). Le nom
composé kénophônia (=voix vide) dénonce deux fois dans les
Pastorales (voir ce mot) les vains discours des controverses
hérétiques (1Ti 6:20,2Ti 2:16). Le seul passage appliquant
l'adjectif kénos à une personne (Jas 2:20) semble bien lui
donner, avec son sens négatif habituel, la portée d'un jugement
moral: homme vain, non pas seulement esprit creux, mais caractère
prétentieux et fat, qui fait étalage de ce qu'il croit savoir (cet
usage du terme se trouve chez Épictète).

2.
C'est la signification habituelle de cet autre terme
grec du N.T., mataios, qui ajoute à la notion négative du vide
une condamnation morale; ce qu'il qualifie est mal, c'est un
péché (Ac 14:15,1Co 3:20 15:17,Tit 3:9,Jas 1:26,1Pi 1:18).
Cette nuance est particulièrement sensible dans l'emploi de l'adverbe
correspondant (Mr 7:7,Mt 15:9) et dans la gradation entre 1Co
15:14, prédication sans effet, foi sans valeur (kénos), et
1Co 15:17, foi mauvaise (mataïos), puisqu'elle frustre du
salut, en laissant «dans son péché» celui qui la professe. Le
substantif de même racine, mataiotès, très fréquent dans les LXX,
ne se trouve que trois fois dans le N.T.: dans Ro 8:20, la
vanité à laquelle la création a été soumise, représente probablement
les puissances qui la dominent depuis la Chute, dont la principale
est la mort, et qui seront détruites par le Christ aux derniers
temps: (1Co 15:24,26) dans Eph 4:17, en un sens moins
métaphysique, plus moral, la vanité des pensées que suivent les
païens représente «une intelligence obscurcie» par leur ignorance à
l'égard de Dieu; dans 2Pi 2:18, la condamnation des «discours
vides» (Vers Syn.) se justifie par le jugement sur l'incon-duite de
ceux qui les tiennent, en «séduisant par les convoitises de la chair»
leurs auditeurs à peine réchappés de l'erreur. L'idée générale de ce
terme semble être l'absence de but conscient ou l'incapacité d'en
atteindre un. Elle se retrouve dans les deux noms composés des
Pastorales maiaïologia-- vain discours (1Ti 1:6), mataïologos =vain parleur (Tit 1:10).

3.
Le qualificatif argos (de a privatif, ergon =oeuvre)
a tout spécialement ce sens de «sans effet» dans
la sévère menace de Mt 12:36 à propos des paroles vaines,
c'est-à-dire inutiles, dont il faudra rendre compte au jour du
jugement. R. H.