TOMBEAU, TOMBE
C'est hors des villes, loin des lieux habités, que les Hébreux
avaient coutume d'enterrer leurs morts; car tout contact avec un
tombeau entraînait une souillure (No 19:16). Exception fut faite
parfois pour les tombeaux des rois (1Ro 2:10,2Ch 16:14).
La tombe la plus commune était une fosse creusée dans la terre,
où le corps était déposé, sans cercueil; la fosse une fois comblée,
on la recouvrait d'un tas de pierres, parfois d'une dalle posée à
plat, pour empêcher les bêtes sauvages de la profaner (voir aussi
Revenant).
Le plus souvent le sépulcre était creusé dans le rocher, ou au
flanc d'un coteau au sol rocailleux. La forme la plus fréquente était
la simple fosse, ou l'auge dans le roc. Les tombeaux des gens de
qualité, notamment à l'époque chrétienne, consistaient le plus
souvent en caveaux formant chambres d'environ quatre coudées sur six
(deux mètres sur trois); on pénétrait de plain-pied dans la grotte,
par une ouverture carrée formant porte. Le long des parois, on
déposait les corps dans des excavations horizontales en banquettes
étroites qui se rétrécissaient dans le sens où l'on plaçait les pieds
du mort; les murs étaient aussi creusés de fours à cercueils. Le
sépulcre était bien terme par une lourde pierre, roulée devant
l'ouverture (fig. 282) et scellée avec du plâtre. Certaines tombes
princières ont un portail à frise et fronton, d'influence
grécoromaine (fig. 281), ou bien une construction à pyramide,
d'influence égyptienne. Les pierres mortuaires des cimetières sont
couchées, en cubes ou parallélépipèdes; la colonne grecque comme la
stèle de l'islam sont inconnues de l'art funéraire israélite.
Tous les ans, au mois d'adar (février), les sépulcres étaient
soigneusement blanchis avec de la chaux. Pourquoi cette coutume?
Parce que, d'après un talmud, «de même que le lépreux crie: Je suis
souillé, je suis souillé! de même, par cette couleur blanche, la
tombe te crie: N'approche pas!». (cf. Mt 23:27,Lu 11:44, fig.
283)
Les sépulcres ne devaient pas être situés à moins de 50 coudées
du mur d'enceinte du village (Mischna, Baba Bathra, 11, 9). On
recherchait de préférence les lieux élevés ou les pentes des
collines (Esa 22:16). Volontiers on creusait le sépulcre à
l'ombre d'un grand arbre (Ge 35:8,1Sa 31:13), parfois dans un
jardin (Jn 19:41). Les familles riches avaient leur tombe dans
leurs propriétés particulières, et cette présence rendait encore plus
sacré, pour les descendants, le patrimoine terrien dont on ne pouvait
se dessaisir sans se déshonorer.
Les tombeaux étaient entourés de la plus grande vénération,
surtout ceux des personnages célèbres, et cette vénération prenait
facilement un caractère superstitieux (Mt 23:29).
Reposer dans le même sépulcre que ses ancêtres était la grande
ambition des Israélites; pouvoir «se coucher avec ses pères» était
considéré comme le couronnement d'une vie bénie de Dieu. Par contre,
il fallait des circonstances bien extraordinaires pour accepter
l'ensevelissement d'un étranger dans un tombeau familial. Joas honora
de la sorte les restes du grand-prêtre Jéhojada (2Ch 24:16), et
Joseph d'Arimathée déposa la dépouille de Jésus dans son sépulcre
neuf (Mt 27:60).
Il existait des cimetières réservés aux pauvres, aux étrangers,
aux pèlerins. La vallée du Cédron ou vallée de Josaphat (voir art.)
fut considérée comme un lieu privilégié. Le sol y est couvert de
pierres tombales, c'est comme un vaste cimetière. Le désir qu'ont les
Juifs d'y être ensevelis provient d'une interprétation arbitraire de
Joe (Joe 3 2,12,14), qui prétend situer en cet endroit la scène
du jugement dernier.
On montre aujourd'hui, aux pèlerins en Terre sainte, un certain
nombre de tombeaux dont l'authenticité est plus que douteuse: ceux
d'Absalom (cf. 2Sa 18:18) et de Zacharie dans la vallée du
Cédron, de Rachel (cf. Ge 35:16,20) à Bethléhem, de
Jean-Baptiste dans la mosquée des Ommiades à Damas; la mosquée
d'Hébron serait construite sur l'ancienne grotte de Macpéla (voir ce
mot) où dorment les patriarches, et les musulmans prétendent y
conserver les momies de ces nobles ancêtres mais se refusent à en
laisser approcher les chrétiens. Le tombeau du Christ lui-même ne
peut être localisé avec certitude: toute la tradition le plaçait à
l'Ouest de la ville, au lieu où l'on éleva l'église dite pour cette
raison «du Saint-Sépulcre»; l'hypothèse moderne relative au «tombeau
du Jardin», au Nord de Jérusalem, fait corps avec celle du «Calvaire
de Gordon» (fig. 99), contestable et contestée (voir Golgotha). Les
tombeaux dits «des Rois», au Nord de Jérusalem, constituent une
nécropole souterraine d'une dizaine de chambres sépulcrales avec une
trentaine de banquettes ou fours funéraires; on pense aujourd'hui que
ces catacombes furent celles de la reine d'Adiabène, prosélyte juive
venue à Jérusalem au milieu du I er siècle, et dont le fils Izatès
eut lui-même vingt-quatre fils. Par ailleurs, les fouilles
poursuivies depuis la grande guerre dans la colline S.-E, de la
Jérusalem antique ont remis au jour des sépulcres dans le roc, de
l'époque de divers rois comme Ézéchias, où de nombreux archéologues
pensent reconnaître l'emplacement de la nécropole des rois de Juda
depuis le temps de la cité de David (fig. 280).
Dans nos diverses traductions de la Bible, les termes de:
tombeau, sépulcre, fosse, séjour des morts, représentent souvent
l'hébreu Cheol (voir ce mot).
Pour les usages aux funérailles, voir Deuil 1:1 RITES FUNÉRAIRES.
P. B.-M.