TENTE
L'utilisation de la tente est sans doute le premier progrès que l'art
de l'habitation ait connu. Elle devint probablement une nécessité
pour les habitants des cavernes lorsqu'ils eurent des troupeaux:
obligés de changer de pacages, ils durent abandonner leurs demeures
sédentaires et se réfugier sous des abris faits de peaux de bêtes.
Une grande partie de l'histoire du peuple d'Israël (patriarches,
désert et conquête) nous parle de ces tentes (Ge 4:20 9:21 12:8
18:9 25:27,No 24:5,Jos 7:21,1Sa 17:54 etc.). Même longtemps après
son installation dans les maisons des villes et des villages,
persistèrent dans le langage courant des expressions de la vie
d'autrefois; rentrer chez soi se disait, littéralement: rentrer dans
ses tentes (hébreu de Jug 19:9); comp, le cri de ralliement: «A
tes tentes, Israël!» (1Ro 12:16). Pendant des siècles la vie
religieuse du peuple fut concentrée autour de la tente par
excellence: le Tabernacle (voir ce mot), du latin de la Vulg,
tabernaculum =tente. Bien des prophètes regrettèrent l'époque où
Israël habitait sous des tentes, parce que celles-ci représentaient
le genre de vie du «désert», l'existence nomade, tellement préférable
à la corruption des villes cananéennes (voir Vie pastorale).
On aura une idée assez nette de la tente des Hébreux en étudiant
la tente très simple du bédouin d'aujourd'hui. Elle se fabriquait,
comme de nos jours encore, en cousant bout à bout deux pièces
d'étoffe tissée en poils de chèvre (cf. Ca 1:5): voir Filage et
tissage. Ces «rideaux» (Jer 4:20 Ex 26:2) étaient soutenus par
des poteaux; il y en avait généralement 0. disposés sur 3 rangs de 3.
Les poteaux eux-mêmes étaient maintenus grâce à des tendeurs fichés
en terre par les pieux ou piquets de tente, qu'on enfonçait à coups
de maillet (Job 4:21, litt.: la corde de leur tente est rompue;
Jug 4:21, le piquet de tente et son maillet; Za 10:4. le
piquet de tente est, avec la pierre angulaire et l'arc de combat,
l'emblème des chefs qui soutiennent le pays).
La tente se séparait en deux chambres au moyen d'un rideau qui se
fixait sur les poteaux du second rang; une chambre était réservée aux
femmes (Jug 15:1,Ca 3:4). Pour celles-ci, les riches avaient des
tentes séparées (Ge 24:67 31:33). Les formes variaient,
certaines tentes ressemblaient à un bateau renversé, d'autres étaient
elliptiques: d'où la comparaison du firmament avec une tente (Esa
40:22,Ps 104:2), d'autres coniques, comme certaines sculptures
assyriennes représentent des campements militaires.
La tente royale en campagne (cf. 1Ro 20:12 etc.) se faisait
remarquer par un luxe tout spécial: d'après des bas-reliefs de bronze
retrouvés à Balawat près Nimroûd, la première chambre tenait Heu de
vestibule, le sol était recouvert de tapis ou de nattes, les
séparations et les tentures étaient en fin lin ou en tapisseries (cf.
le palanquin de Salomon, Ca 3:7). La tente nuptiale des époux
est le dais (voir ce mot).
L'apôtre Paul était fabricant de toiles de tentes, comme aussi
Priscille et Aquilas (Ac 18:3).
Au figuré, la tente est parfois attribuée, poétiquement, à
Dieu (Ps 15:119:5 27:5 et suivant, etc.).
Elle est souvent l'emblème de l'habitation, qualifiée par le
caractère de ses habitants (Job 8:22 12:6,Ps 84:11 118:15,Pr
14:11 etc.).
Les textes les moins anciens ajoutent à cette image l'idée du
transitoire, de l'éphémère (Esa 33:20 38:12,2Co 5:1,4,Heb 11:9,2Pi
1:13).
Notons enfin, dans Jn 1:14, le grand contraste exprimé par
le texte grec et qui échappe au lecteur des traductions: «La Parole a
habité parmi nous...», grec eskênôsèn, litt.: elle a demeuré sous
la tente. Ls F.