PSEUDÉPIGRAPHES (les livres)

On désigne ainsi un certain nombre d'écrits juifs, parus vers le
début de notre ère (pour la plupart entre--100 et + 100 environ), qui
ont joui d'une grande autorité dans les milieux religieux du temps,
mais qui n'ont pas été admis dans le Canon de l'A.T, (voir art.).
Quelques-uns pourtant figurent dans des manuscrits et dans des
éditions de la Bible grecque. On les a appelés pseudépigraphes
parce qu'ils portent un «faux nom» d'auteur. Mais cette particularité
ne leur est pas commune à tous (certains sont anonymes), et ils ne
sont pas seuls à la présenter: d'autres livres, parmi les apocryphes
(voir ce mot) ou même les canoniques, sont attribués à des auteurs
fictifs, sans qu'il y ait nécessairement de la faute de celui qui les
a composés. Le titre de la collection est donc bien mal choisi. La
collection elle-même n'est pas rigoureusement délimitée: certains
écrits (3 et 4 Macchabées, 2 et 3 Esdras) sont rangés tantôt parmi
les apocryphes, tantôt parmi les pseudépigraphes. Voici, à titre
d'exemple, la table des matières de la traduction des Pseudépigraphes
publiée sous la direction de Kautzsch (Tübingen 1900).

(a) Légendes: la Lettre d'Aristée, le Livre des
Jubilés, le Martyre d'Ésaïe,

(b) Poésie: les Psaumes de Salomon,

(c) Livre didactique: le 4 e livre des Macchabées,

(d) Apocalypses: les Oracles sibyllins, le Livre
d'Hénoch, l'Assomption de Moïse, le 4 e livre d'Esdras, les
Apocalypses de Baruch (une syrienne et une grecque), les Testaments
des xii Patriarches, la Vie d'Adam et d'Eve.

Nous traiterons ici seulement de la Lettre d'Aristée, de 4
Macchabées et des Psaumes de Salomon, auxquels nous joindrons les
Odes (quoique plusieurs au moins soient d'origine chrétienne). Pour
les autres, voir Apocalypses.

La Lettre d'Aristée. L'auteur se donne comme un haut dignitaire
du roi d'Egypte, Ptolémée II Philadelphe, et comme un païen. Il écrit
à son ami Philocrate pour lui raconter l'origine de la traduction
grecque de la Bible, dite Version des LXX (voir Texte de l'A.T., II,
4, a). Sur le conseil de Démétrius de Phalère, conservateur de
la fameuse bibliothèque d'Alexandrie, le roi envoie un message au
grand-prêtre Eléazar, pour obtenir une copie et une traduction des
livres de la Loi des Juifs. Le pontife accueille favorablement cette
demande et délègue à Philadelphe 7:2 docteurs (6 de chaque tribu),
également versés dans la connaissance de la Loi et de la langue
grecque. Après un magnifique banquet à la cour, où ils ont l'occasion
de faire briller leur sagesse devant le roi, ils sont installés dans
l'île de Pharos et se mettent à l'oeuvre. Ils travaillent 8 heures
par jour, Démétrios consignant par écrit la traduction, sur tous les
détails de laquelle ils ont réalisé un accord unanime. La tâche est
achevée en 72 jours. 72 docteurs, 72 jours; de là le nom de version
des Septante

Ce récit est une pure légende, mais il contient des détails
secondaires qui ne sont pas sans intérêt pour l'histoire (par ex. sur
la Diaspora juive établie en Egypte). Assurément, il n'émane pas d'un
païen (la loi et le peuple juifs y sont glorifiés sans mesure), et il
n'a pas été rédigé sous Ptolémée II (début du III° siècle av. J.-C.):
l'auteur commet de graves erreurs sur cette époque, et il lui arrive,
oubliant son rôle, de distinguer son propre temps de celui de
Philadelphe; il écrivait en tout cas avant Philon et Josèphe, qui ont
développé sa légende. D'après les détails qu'il donne sur la
situation de la Palestine, on peut conjecturer qu'il vivait dans la
première moitié du I er siècle av. J.-C.

Les Psaumes de Salomon (voir art. préc). Recueil de 18 morceaux,
qui a été admis dans quelques manuscrits et éditions des LXX (par ex.
dans la Bible de Swete).

Tout indique que ces psaumes ont été traduits d'un original
hébreu, mais qu'ils n'ont rien à faire avec Salomon.

Les Odes. Recueil de cantiques ou de prières, qui se trouve dans
quelques manuscrits (par ex. l'Alexandrinus) et dans quelques
éditions des LXX (Swete). Sur les 14 morceaux qu'il contient, 7 sont
empruntés à l'A.T. (Ex 15:1-19,De 32:1-43 etc.), 3 aux
Apocryphes (Prière de Manassé, Prière d'Azarias, Cantique des trois
jeunes gens), et 3 au N.T (Lu 1:46-55 2:29-32 1:68-79). Le
dernier seul, intitulé Hymne national, est une composition
indépendante, sinon originale (il débute par Lu 2:14 et est tout
plein d'expressions de l'A.T.); c'est une action de grâces et une
prière à Dieu le Père, au Fils et à l'Esprit Saint.

4 Macchabées. Écrit didactique, qui se trouve dans plusieurs
manuscrits des LXX (Sinaïticus, Alexandrinus, etc.) et dans la Bible
de Swete. Il se présente comme «un discours philosophique destiné à
démontrer que la pieuse raison est maîtresse des passions». Les
considérations de pure psychologie y tiennent peu de place.
L'argumentation se fonde presque entièrement sur des exemples tirés
de l'histoire juive: elle exploite en particulier les récits de
martyre contenus dans 2Ma 6:18-7:42 (Éléazar et les 7
jeunes gens avec leur mère). C'est ce qui a valu son titre à notre
livre. Mais il n'a aucun rapport avec la famille des
Macchabées.--Cette dissertation a été souvent attribuée à Josèphe,
dans l'antiquité, mais sans motif valable. Elle est d'un Juif
hellénisé, qui écrivait postérieurement à 2 Macchabées, sans doute
aux environs de l'ère chrétienne. L. R.