PAON

Le pluriel hébreu toukkiyim (1Ro 10:22,2Ch 9:21) doit être la
transcription du nom de cet oiseau en langue tamoule: tôkhaï,
sous lequel il est encore connu à Ceylan et sur la côte de Malabar.
En effet, le paon (pavo cristatus) est originaire de l'Inde, où
il est toujours commun. Mais au temps de Salomon, il était aussi rare
que coûteux et difficile à élever en pays méditerranéen: son
apparition en Palestine est donnée ici comme dernier trait du luxe
fabuleux du grand roi. Ce n'est que 500 ans plus tard, au milieu du V
e siècle, que cet animal devait être introduit en Grèce, où il devint
à Samos l'oiseau consacré à Héra (Junon). Rome l'importa à la fin du
II° siècle comme mets de grand luxe. La chevalerie le tenait pour
«noble oiseau»; et le paon rôti, «viande des preux», était le plat
principal des banquets aux engagements solennels, qu'on appelait le
«voeu du paon». La légende qui prétendait la chair du paon
indestructible l'avait fait prendre assez tôt parmi les chrétiens
comme symbole de la résurrection du Christ et de l'immortalité.

Dans les deux passages parallèles 1Ro 10:22 et 2Ch 9:21,
la plupart des éditions des LXX n'ont pas compris l'hébreu
toukkiyim. Le critique Winckler a suggéré la lecture
soukkiyitn, nom des Sukkiens, peuple cité encore dans 2Ch
12:3, et qui pourrait représenter des Noirs; en ce cas, les trois
genres d'importation attribués ici à l'opulence de Salomon: ivoire,
singes et nègres, seraient tous d'origine africaine et auraient pu
être embarqués sur ses navires dans les parages du S. de la mer
Rouge. D'autre part, la Vulgate de Jérôme traduit déjà le mot hébreu
par pavones (paons); comme ceux-ci pouvaient provenir de l'Inde
aussi bien que les éléphants et les singes mentionnés en même temps,
il n'y a sans doute pas de raison pour renoncer à cette traduction,
généralement adoptée. Au surplus il se peut, comme le fait remarquer
Reuss, que l'énumération des cinq produits importés par la flotte
royale soit un raccourci correspondant à des voyages différents en
des contrées fort distantes les unes des autres.