NIL

La longueur du Nil, à partir de la source du Nyavarongo (affluent du
Kégera, qui se jette dans le lac Victoria-Nyanza d'où sort le Nil),
est à peu près de 6.500 km., c-à-d, qu'elle égale presque celle du
Mississipi-Missouri (6.600 km.), le plus long fleuve du monde. La
source du Nil que nous venons d'indiquer n'a été déterminée avec
précision, après plusieurs siècles de recherches, que vers la fin du
XIX e; pour les anciens, le lieu d'origine du Nil resta un mystère
impénétrable. Les anciens Égyptiens remontèrent le fleuve jusqu'au
confluent du Ghazal et connaissaient le Nil Bleu, mais ne savaient
rien des grands lacs; un de leurs chants adressés au Nil contient ces
mots: «Toi qui caches ta venue dans les ténèbres.» Hérodote, qui
arriva à Assouan, supposait que la source était dans la région du lac
Tchad. Ératosthène (vers 250 av. J.-C.) prépara une assez bonne carte
du Nil jusqu'au confluent du Nil Bleu et, pour la première fois, fit
allusion aux lacs équatoriaux comme sources du fleuve. Quatre siècles
plus tard, Ptolémée sait que le Nil sort des lacs Albert et Victoria,
mais il les place un peu trop au sud. Le cours du Nil n'a pas changé
sensiblement depuis l'antiquité, sauf dans le Delta: maintenant les
deux bouches du Nil, celles de Rosette et de Damiette, se trouvent
dans sa région centrale, tandis qu'au temps des Pharaons les deux
plus importantes (Il y en avait sept) se trouvaient aux extrémités du
Delta. En Nubie, le Nil traverse une vallée calcaire étroite (3-5
km.) et n'est guère large que de 500 m. (les dix «cataractes» sont
les endroits étroits), tandis qu'en Egypte, au Nord d'Assouan, il
atteint un km., dans une vallée qui a parfois 25 km. de largeur.

La crue annuelle du Nil (Am 9:5 8:8), mystère surprenant
pour les Égyptiens et les Grecs, est le résultat des pluies
abondantes (juin-septembre) tombant en Abyssinie et qui alimentent le
Nil Bleu, dont la crue (comportant 100.000 mètres cubes par seconde)
dure de juin à octobre. Pendant le reste de l'année, c'est l'eau de
la région des lacs qui alimente le fleuve. Le Nil monte, pendant la
crue, de 7 m. à Assouan et de 4 m. 90 au Caire, et il inonde
l'Egypte, déposant un humus riche en alcali, mais pauvre en azote. La
région inondée, par conséquent, est couverte d'un sédiment de 10 à 12
cm. de profondeur, tandis que le lit du fleuve monte de 10 cm. par
siècle. L'Egypte est donc un «don du fleuve» (Hérodote): elle lui
doit sa fertilité et sa civilisation. La nécessité de régler
l'inondation développa l'hydrographie et l'irrigation (De 11:10);
pour connaître d'avance la date de la crue, on étudia les astres et
l'on fixa le calendrier; l'effacement annuel des bornes des champs
rendit indispensables les travaux des géomètres. Une forte
organisation sociale, un gouvernement central stable, une législation
équitable furent imposés aux Égyptiens par le régime du Nil.

Le nom de Nil est dérivé du grec et se lit déjà dans Hésiode;
Homère appelle le fleuve Aïguptos (=Egypte), au masc.
(Odyss., IV, 477; XIV, 258); le fém. du mot s'applique au pays.
«Nil» n'a pas d'étymologie égyptienne. Les Égyptiens appelaient leur
fleuve Ho J p(1), que les théologiens des époques plus récentes
identifiaient faussement avec «Apis» (Hp) ; ordinairement on
disait simplement le «fleuve» (yetor, plus tard ye'or, d'où
l'hébreu ye'or) ou «le grand fleuve» (ye'or-a). Dans l'A.T, ye'or
désigne généralement le Nil (Ge 41:1-3,17 Ex 1:22 2:3-5
4:9 7:15-25 8:5,9 17:5 Esa 19:7 23:3,10 Jer 46:7 Eze 29:3,9,Am 8:8
9:5,Zach,10:11); dans Da 12:5-7 il s'agit du Tigre. Au pluriel,
ce mot désigne (sauf Esa 33:21,Job 28:11, dont le sens est
obscur) les branches et les canaux du Nil (Ex 7:19 8:3,2Ro
19:24,Esa 7:18 19:6 37:25,Eze 29:3-5-10 30:12,Na 3:8,Ps 78:44).
Suivant les LXX et la Vulgate, qui traduisent par «fleuve» (sauf dans
Esa 19:6 33:21 37:25), un certain nombre de versions modernes
emploient les noms communs: «fleuve», «rivières», au lieu du nom
propre: «Nil», «branches du Nil».
CONSULTER: A. Moret, Le Nil et la Civilisation égyptienne,
Paris 1926, pp. 31-40. Voir Egypte. R.H. Pf.