ANNE

(grec Anna, de l'hébreu Khannâh =grâce).

1.
La mère de Samuel (1Sa 1). Son mari Elkana était
de Rama, ville de la tribu de Benjamin, située dans les montagnes
d'Éphraïm (Ramathaïm-Tsophim n'est qu'une désignation plus complète:
cf. Ramatha dans Josèphe, Ant., V, 10:2). Avec ses deux femmes,
Anne et Péninna, il se rendait tous les ans à Silo pour offrir un
sacrifice à Jéhovah. Anne était stérile et en éprouvait une profonde
tristesse, bien que son mari la traitât avec beaucoup d'égards et la
préférât à Péninna. Une année, après le repas traditionnel qui
suivait le sacrifice d'actions de grâces, (voy. Le 7:15) Anne
entra dans le temple et, dans sa détresse, pria l'Éternel devant
l'arche sainte. Elle fit le voeu, si un fils lui était donné, de le
consacrer à Dieu (les détails du verset 11 font penser à la pratique
du naziréat, institution très connue en Israël, voy. No 6:6).
Son voeu fut exaucé. Dès qu'elle eut sevré l'enfant, Anne revint pour
présenter son fils à l'Éternel et offrir les sacrifices prescrits par
la loi: après l'avoir consacré solennellement au service de Dieu,
elle le laissa sous la direction du prêtre Héli au sanctuaire de
Silo. Elle eut dans la suite trois autres fils et deux
filles (1Sa 2:21).

Le Cantique d'Anne (1Sa 2:1-11) est une prière d'actions
de grâces qu'elle aurait prononcée au moment où elle consacra Samuel
à l'Éternel. C'est en réalité un psaume de délivrance qui n'a guère
de rapports avec la situation historique: il a dû être ajouté après
coup, car il paraît d'une époque plus tardive que le récit lui-même
(le v. 6 semble indiquer une notion théologique assez récente en
Israël au sujet de l'immortalité de l'âme); la fin a une allure de
chant messianique qui fait penser à la période postexilique. Seul le
verset 5, qui mentionne une femme stérile, a pu créer un lien entre
ce poème et Anne. En tout cas, ce chant a inspiré le cantique d'une
autre mère: Marie (Lu 1:46 et suivants), dans son Magnificat
(voir ce mot).

2.
Transcrit sous la forme Anna, nom de la femme de
Tobit et mère de Tobie (Tob 1:9,20 2:1,11 5:18 14:12).

3.
Fille de Phanuel, de la tribu d'Asser (voir ce mot).
Les femmes de cette tribu étaient renommées pour leur beauté, et
plusieurs grands-prêtres et rois y prirent leurs épouses. Anne était
parmi les gens «pieux» d'Israël qui, à une époque de relâchement
religieux, attendaient avec persévérance la venue du
«Consolateur». (cf. Lu 2:25) Veuve depuis de longues années
après sept ans de mariage, elle était âgée de quatre-vingt-quatre ans
(mais on pourrait traduire aussi: «restée veuve depuis
quatre-vingt-quatre ans», ce qui la ferait plus que centenaire). Son
grand âge ne l'empêchait pas de pratiquer régulièrement le jeûne et
la prière, et de servir Dieu nuit et jour sans sortir du Temple, (cf.
Ps 27:4) ce qui veut dire, non qu'elle y résidait effectivement,
mais qu'elle n'en manquait aucune cérémonie. Elle réalisait l'idéal
de la veuve d'après l'apôtre Paul, qui, «restée seule, met son
espérance en Dieu et persévère nuit et jour dans la prière et
l'oraison» (1Ti 5:5). Elle possédait un don de parole inspirée
qui l'avait fait appeler prophétesse. Arrivant au moment où Siméon
bénissait le petit enfant Jésus, «elle se mit à son tour à louer Dieu
et à parler de cet enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance
de Jérusalem» (Lu 2:36,38). Ce tableau d'Anne la prophétesse,
avec l'accent mis sur sa virginité, son long veuvage, ses dévotions
continuelles, ses louanges au Seigneur, en fit plus tard un type de
la vie monastique; il n'est pas impossible que son nom soit à
l'origine de la tradition sur la prétendue Anne, mère de Marie (n° 4).

4.
D'après plusieurs évangiles apocryphes (Protév. de
Jacques, pseudo-Matth., etc.), épouse de Joachim et mère de Marie
mère de Jésus; complètement absente du N.T. canonique. Son culte fut
admis par le pape au XVI e siècle, et son principal sanctuaire est à
Auray, centre de célèbres «pardons» bretons.