MÉGUIDDO
Aujourd'hui Tell el-Moutésellim, au bord de la plaine d'Esdrelon,
sur la route directe qui, de Djenîn à Haïfa, longe la chaîne du
Carmel, à 18 km. au Nord-O, de Djenîn. Les tablettes d'el-Amarna
mentionnent Ma-gid-da, dès le XIV e siècle, ce qui n'étonne pas,
puisque Thoutmès III (1501-1447), la 23 e année de son règne, livra
déjà bataille sous ses murs, contre la coalition des «pays du Retenou
supérieur» (=Syrie). Méguiddo fut prise, et le pharaon vainqueur
détailla fièrement sur les murs du Temple de Karnak (6e pylône,
salle des Annales) l'inventaire de son butin: prisonniers, chevaux,
chars, armes, mobilier, objets précieux, récoltes, etc.
La ville était toujours une solide forteresse, et son roi résista
à Josué (Jos 12:21). Elle demeura en possession des Cananéens,
malgré tous les efforts des Israélites et en particulier de Manassé
(Jos 17:12 et suivant, Jug 1:27 et suivant). Avec Thaanac,
Méguiddo restait le centre de l'opposition; c'est encore auprès de la
petite rivière qui coule non loin de ses remparts qu'eut lieu la
rencontre où les rois cananéens furent battus par Barak et
Débora (Jug 5:19). L'indépendance avait pourtant pris fin et
Salomon fortifia Méguiddo (1Ro 9:15), qu'il avait fait entrer
sous son administration (1Ro 4:12).
C'est là que vint mourir Achazia, roi de Juda, mortellement
frappé par Jéhu (2Ro 9:27) et que Josias, essayant d'arrêter
Néco, tomba sous les coups de ce pharaon (2Ro 23:29,2Ch 35:22),
en 608 av. J.-C. Il est assez curieux qu'une des scènes de bataille
de l'Apocalypse johannique soit située à la «montagne de Méguiddo» ou
Harmaguédon (voir ce mot), cela sans doute en souvenir des nombreux
et violents combats antérieurs (Ap 16:16). Un peu au Sud de Tell
el-Moutésellim, le site de el-Leddjoûn a conservé le nom et
l'emplacement de l'ancienne Legio, citée par Eusèbe, installation
romaine, chargée de surveiller la route antique qui, traversant la
chaîne du Carmel, permettait de passer de la plaine du Saron dans
celle d'Esdrelon.
Toutes les armées l'utilisèrent, pour éviter le trop étroit
défilé du «nez de la gazelle» (à la pointe du Carmel). Ce sont les
fouilles entreprises de 1903 à 1905 par M. Schumacher qui permirent
l'identification du site de Tell el-Moutésellim avec Méguiddo. Ces
premiers travaux avaient révélé toute l'ampleur de la fortification
de la ville: mur d'enceinte, glacis, fortin intérieur entouré d'un
mur et d'un fossé. Tout cela illustrait un des épisodes de la
campagne de Thoutmès III pourchassant ses ennemis, hissés au dernier
moment par-dessus les remparts, la ville étant déjà fermée. Un grand
nombre d'objets égyptiens avaient été découverts à Méguiddo, mais
aussi des documents attestant une influence babylonienne (sceaux),
phénicienne (cornet à encens), ou portant la marque d'un travail
local: tel le fameux cachet (fig. 238) de «Schéma, fonctionnaire de
Jéroboam» (sans doute Jéroboam II, roi d'Israël, 782-743); une
intéressante céramique aussi, avec la représentation de guerriers
cananéens (peints en brun rouge ou en noir), ceux qui résistèrent aux
Israélites de Josué. Sous les remparts de la ville, plusieurs
sacrifices de fondation avaient été retrouvés (enfant enfoui dans une
jarre, jeune fille étendue sur un des rochers à la base de la
citadelle), rappelant ceux qu'atteste l'A.T, (cf. 1Ro 16:34 et
fig. 90).
Depuis 1926, les fouilles ont été reprises à Méguiddo par M.
Fisher, auquel a succédé M. Guy, pour le compte de l'Université de
Chicago. Les travaux, menés désormais avec une méthode faite de
minutie et en même temps d'ampleur, se proposent de décaper le tell,
couche après couche, les plus anciennes en date apparaissant ainsi
les dernières. De pareilles recherches exercent à la patience mais ne
laissent rien échapper. Elles ont déjà rendu un fragment
d'inscription au nom de Sheshonk I er (le Sisak de 1Ro 14:25),
mais surtout dégagé, en août 1928, les vestiges d'écuries que
l'archéologue date du temps de Salomon (rapprocher les données de
1Ro 9:15 9:19). Les fouilles continuent et l'on peut s'attendre
normalement à de belles trouvailles relatives à l'époque de Thoutmès
III A. P.