ÂNE
(hébreu arôd, père, khamor, âthon, ayir; grec, onos)
La multiplicité des noms donnés à cet animal indique son importance
dans la Bible.
--Les deux premiers termes concernent l'âne sauvage. Il a disparu
de la Palestine et de son voisinage immédiat. On le retrouve dans
l'Asie orientale (asinus hemippus) et dans l'Asie centrale (a.
hemione). C'est probablement le pire de la Bible.
Une autre espèce (a. vidgaris) habite les déserts de l'Egypte
et de l'Afrique septentrionale. C'est peut-être l' arôd de l'A.T.
Ces diverses espèces vivent en bandes nombreuses, se déplaçant du N.
au Sud et du S. au Nord suivant les saisons.
L' Arôd est mentionné deux fois. Dans Job 39:8, il est
mis en parallèle avec père. Da 5:21 nous représente
Nébucadnetsar frappé de folie, vivant parmi les ânes sauvages.
Le père est cité beaucoup plus souvent:
Job 6:5 11:12 24:5 39:8-11,Esa 32:14,Jer 2:24 14:6,Os 8:9 décrivent ses moeurs et
relèvent son caractère farouche et indomptable, sa prédilection pour
les pires solitudes.Dans Ge 16:12, l'ange déclare à Agar
qu'Ismaël sera semblable à un âne sauvage.
--Les trois autres termes hébreu et le terme grec s'appliquent à
l'âne domestiqué. Khamor est l'âne mâle, âthon l'ânesse, ayir l'ânon.
L'âne domestique dérive de l'espèce africaine. Son asservissement
remonte très haut. Il figure sur les anciens monuments de l'Egypte et
de la Caldée.
L'âne d'Orient ne ressemble en rien à l'âne dégénéré de l'Europe.
Cette dégénérescence provient en partie de notre climat plus rude,
mais surtout des mauvais traitements qu'on n'a cessé de prodiguer à
ce pauvre animal. L'âne d'Orient est très supérieur au nôtre. Il est
plus grand, plus fort et plus vif. Il peut marcher tout un jour à une
allure modérée avec un cavalier sur le dos et trotter des heures
entières sans faiblir. Aux montées et sur les mauvais chemins, il
dépasse toujours le cheval. Son pied est sûr. Sa conduite facile et
son allure vive en font une monture très agréable. Son harnachement
est très spécial. Il comprend une couverture de laine plusieurs fois
repliée, une selle épaisse fortement rembourrée, absolument plate,
surmontée d'un pommeau élevé arrondi. Le tout est recouvert d'un
tapis aux vives couleurs garni d'une large frange. Les étriers sont
petits et étroits. La bride est ornée de broderies, de glands, de
coquillages et parfois de clochettes. L'âne d'Orient est bien soigné,
bien nourri.
Celui de Palestine est le plus beau. La domestication l'a très
peu modifié. On surveille avec soin sa reproduction et on n'utilise
comme générateurs que des bêtes de choix. Le mâle n'est guère
employé. Il est rétif et son braiement est désagréable. On préfère
l'ânesse, plus paisible et plus maniable. Une ânesse de race est très
prisée comme reproductrice et peut atteindre des prix élevés. Les
ânons trottinent généralement à côté de leurs mères. On les habitue
peu à peu à porter des fardeaux, mais on ne les monte pas avant la
troisième année. L'âne est peut-être de tous les animaux domestiques
celui qui rend le plus de services en Palestine. C'est la monture du
fellah, c'est aussi sa bête de somme. Il sert pour tous les travaux
agricoles (labourage, dépiquage, charrois). On croise souvent sur les
pistes de l'Orient de longues files d'ânes diversement
chargés.
--L'âne est mentionné plus de 90 fois dans la Bible. Il y est,
comme aujourd'hui dans tout l'Orient, la monture des riches et des
grands (Ge 22:3,No 22:21, cf. 2Pi 2:16,Jug 10:4 12:14,2Sa
17:23 19:26, 1Ro 13:23). Il est aussi la monture des femmes (Ex
4:20,Jos 15:18,Jug 1:14, 2Ro 4:24), des femmes de qualité (1Sa
25:23).
Les ânes blancs étaient particulièrement prisés et réservés aux
grands personnages (Jug 5:10). Bagdad possède une race célèbre
d'ânes blancs; on en rencontre aussi à Damas, où ils atteignent des
prix très élevés, mais ils sont plus délicats et ne prospèrent pas
sur le littoral. Za 9:9 représente le Messie monté sur un ânon.
«L'âne était l'antique monture des Hébreux, la monture de David et de
ses ancêtres. L'importation des chevaux en Israël avait coïncidé avec
les infidélités et le luxe ruineux de Salomon. Mettre sa confiance
dans les chevaux, s'appuyer sur l'homme, renier Jéhovah, c'était tout
un pour les vieux Jéhovistes (Esa 31:1,Os 14:3,Mic 5:9). Aussi
les prophètes devaient-ils représenter le Messie restaurateur des
jours de piété et de gloire, comme un roi monté sur un âne.»
(Westphal.)
L'âne était bien la monture qui convenait au Prince de la
Paix. (cf. Mt 21:1, etc. et parallèle) Avant l'introduction
tardive du cheval (voir ce mot) dans l'Asie Antérieure et en Egypte
(vers 2500 av. J.-C), l'âne servait à la guerre. Les fouilles
récentes d'Ur en Caldée en font foi. La tombe n° 277 (vers 3100 av.
J.-C.) a livré des coquilles gravées; sur l'une d'elles figure, en
tête d'un cortège militaire, un roi suivi de son char attelé de
quatre ânes.
Comme aujourd'hui, l'âne, dans l'antique Israël, servait de bête
de somme (Ge 42:26 49:14,15 1Sa 16:20 25:18,Ne 13:15). On
l'employait aux travaux des champs (Esa 30:24 32:20). La loi
interdisait de l'atteler à la charrue à côté du boeuf, probablement
dans une pensée de bonté, peut-être aussi pour des motifs religieux
et un dessein pédagogique.
La chair de l'âne était réputée impure. On n'en mangeait que dans
les temps de calamité (2Ro 6:25, cf. Eze 23:20). Les
patriarches, les rois, les riches en possédaient de grands troupeaux
(Ge 12:16 32:15,1Sa 9:3, etc., 1Ch 27:30). Samson se sert
contre les Philistins d'une mâchoire d'âne (Jug 15:16).
E. D.