AMOS
(=porteur).
Le troisième des douze petits prophètes n'était ni prophète ni fils
(=disciple) de prophète (Am 7:14), mais berger de brebis (Am
1:1) et de boeufs et cultivateur de sycomores (Am 7:14) à
Thékoa, dans le royaume de Juda, au Sud-E. de Bethléhem, quand il se
sentit appelé par l'Éternel à prophétiser dans le royaume d'Israël.
Il se rendit à Béthel, principal centre du culte idolâtrique
institué par Jéroboam I er; il y prêcha contre les diverses formes de
l'idolâtrie qui y étaient pratiquées et contre les vices, surtout
ceux des grands, déclarant qu'en punition de leurs crimes les
habitants du royaume seraient emmenés en captivité et que la famille
du roi Jéroboam II périrait par l'épée (Am 7:9).
Le sacrificateur de Béthel, Amatsia, le dénonça au roi Jéroboam
II comme perturbateur de l'ordre et révolutionnaire, et lui commanda
de retourner dans son pays. Obligé de céder à la force, il revint en
Juda et y consigna, sans doute peu après, un résumé de ses discours,
précédé d'une sorte d'introduction (Am 1 et Am 2).
Son livre se compose de discours (Am 1-6) et de visions
(Am 7-9). Le premier discours (ou l'introduction) est dirigé contre
Damas, les villes principales des Philistins, Tyr, Édom, les
Ammonites, Moab, Juda, enfin et surtout contre Israël. Il déclare à
tous que l'Éternel ne rétracte pas la menace lancée contre eux (par
son prédécesseur Joël) et leur annonce les plus effroyables
calamités. Dans le discours suivant (Am 3-6), il reproche aux
Israélites leur ingratitude à l'égard de l'Éternel, qui les retira
jadis du pays d'Egypte, et leur dénonce la ruine et l'exil; aux
femmes de Samarie en particulier, il reproche d'encourager leurs
maris à opprimer les petits. Il leur déclare ensuite qu'en punition
de leur idolâtrie ils seront transportés au delà de Damas.
Il y a là un texte particulièrement obscur
(Am 5:25 et suivant) et incohérent en apparence. Voici, me
semble-t-il, la suite des idées: Au désert pendant quarante ans, vous
n'avez pas pu me rendre (régulièrement) le culte des sacrifices.
(Malgré cela, je vous ai introduits en Canaan). Et (maintenant), vous
avez élevé près de votre tabernacle royal et près de
l'emplacement de vos idoles l'étoile de vos dieux que vous vous êtes
faits! (Voilà la reconnaissance que vous m'avez témoignée! Aux idoles
que vous aviez déjà, vous en avez ajouté de nouvelles, des divinités
astrales, caractérisées par une étoile au-dessus de leur image,
que vous avez empruntées aux peuples voisins!) Et je vous exilerai au
delà de Damas! (voir Kijoun).--II crie enfin: malheur! aux grands de
Jérusalem et de Samarie.
Les visions sont au nombre de cinq. Les trois premières
(Am 7:1-9) sont séparées des deux dernières (Am 8) et (Am 9)
par le récit de l'opposition du prêtre de Béthel. Le prophète a vu
d'abord des sauterelles, puis le feu, c'est-à-dire des
chaleurs brûlantes qui détruisaient tout. Il a prié Dieu de détourner
ces fléaux. Il espérait sans doute que le peuple s'humilierait, mais
puisqu'il ne le fait pas, Dieu, dans une troisième vision, lui apparaît
debout sur un mur, un fil à plomb à la main, et lui
déclare qu'il va détruire son peuple et la maison de Jéroboam sans
miséricorde.
C'est alors que le prêtre de Béthel dénonça Amos au roi Jéroboam
II Indigné, le prophète prédit au prêtre aussi les plus effroyables
malheurs.
Malgré le danger, Amos raconte encore au peuple deux visions qui
ont essentiellement le même sens que la précédente, et suivies d'un
discours aussi menaçant que les visions elles-mêmes. La première
repose sur un jeu de mots intraduisible en français: le prophète
a vu une corbeille de fruits d'été (qaîts), c'est-à-dire de
figues, qui signifie que la fin (qets) est venue pour le peuple
d'Israël. La dernière est la plus terrible: Dieu debout sur
l'autel (de Béthel) donne l'ordre de frapper le chapiteau (des
colonnes du sanctuaire) et d'en jeter les débris sur cette foule
d'adorateurs idolâtres. Nul n'échappera! Cependant l'exil du peuple
aura pour effet de le purifier, comme le blé est purifié en étant
secoué dans un crible. Alors Dieu «relèvera la hutte en ruines de
David», c'est-à-dire qu'il rendra à la maison de David, si puissante
jadis et si faible maintenant, sa grandeur première. Elle possédera
de nouveau (non seulement toutes les tribus d'Israël mais aussi) le
reste d'Édom (c'est-à-dire ce qui restera de ce peuple après le
châtiment qui l'aura frappé: cf. Am 1:11) et toutes les nations
sur lesquelles le nom de l'Éternel a été prononcé (c'est-à-dire qui
lui appartenaient autrefois du temps de David et de Salomon). Alors
aussi se réaliseront les promesses d'une prospérité extraordinaire
déjà faites par Joël.
Cette conclusion du livre (Am 9:11,15) ne fut
probablement pas prononcée dans le royaume du Nord, mais ajoutée par
le prophète, en même temps que le discours préliminaire.
Quand Amos prophétisait à Béthel, les Assyriens s'étaient déjà
emparés de Kalné (situation inconnue), de Hamath et de Gath (Am
6:2), au Nord et à l'Ouest de la Palestine. «Ces royaumes, demande
le prophète, valent-ils mieux que ces royaumes-ci (Israël ou Juda),
ou leur territoire est-il plus grand que le vôtre?» c'est-à-dire plus
de nature à exciter la convoitise des rois assyriens. C'est donc de
ceux-ci qu'il attendait la réalisation de ses menaces. Et en effet,
bientôt après, Tiglath-Piléser, Salmanasar et Sargon détruisirent le
royaume d'Israël. Eux et leurs successeurs soumirent aussi la plupart
des peuples voisins. Et, un peu plus tard, le royaume de Juda
lui-même succomba aussi sous les coups de Nébucadnetsar. Mais on ne
peut pas dire que les promesses des prophètes, en tout cas celles-ci,
se soient réalisées aussi littéralement que leurs menaces.
Certains critiques considèrent comme interpolés les oracles
contre les Philistins, les Phéniciens, Juda, Édom, etc. (voir P.
Fargues, Introd. A.T.) et les promesses finales, mais sans
raisons bien convaincantes. Voir Ch. Bruston, Les plus anciens
prophètes, 1907; Hist. crit. de la litt. proph. des Hébreux,
etc., 1881. Cf. Paul Humbert, La. religion d'Amos, dans Rev.
Laus., 1929. Ch. Br.