JOIE

Tout être humain aspire à la joie et se sent fait pour elle.
L'Écriture en apporte à l'homme le secret.

Il est à remarquer que l'hébreu, quoique langue pauvre, possède de
nombreux termes exprimant la joie (simkhâh, le plus courant,
sâsôn, mâsôs, gîl, etc.). D'autre part le message chrétien est
tellement un message de joie qu'il utilise tous les mots que le grec
peut lui fournir (khara, le plus fréquent, agalliasis,
kaukhèma, euphrosuné,
etc.).

Le croyant DOIT SE REJOUIR. Les exhortations à la joie retentissent
partout dans l'A.T, et le N.T., dans le livre des Psaumes en
particulier: «Vous tous, habitants de la terre, faites monter vos
cris d'allégresse jusqu'à l'Éternel! Servez l'Éternel avec joie!»
(Ps 100:1 et suivant; voir encore Ps 32:11 33:1 97:12
132:9, etc., De 28:47) et dans les ép. de saint Paul:
«Réjouissez-vous» (Php 2:18 3:1 4:4,2Co 13:11 1Th 5:16 etc.).
Ainsi la joie est l'état normal de l'enfant de Dieu. «Les saints
tristes, dit saint François de Sales, sont de tristes saints»; et
Vinet: «La foi peut être sans allégresse et sans transport; mais la
foi sans joie n'est pas la foi.»

La source de la joie est EN DIEU, car l'âme a été faite pour Dieu et
c'est en Dieu seul qu'elle trouve son objet: «Dieu, ma joie», s'écrie
le psalmiste (Ps 43:4 16:9,11). Le croyant de l'ancienne
alliance trouve sa joie dans les bienfaits de Dieu (Ps 13:6 35:9
81:2-16 113:9 149:1-4, Esa 25:9 44:23 49:13, etc.),
dans sa loi (Ps 119:14,16,24,35,47,70), dans son pardon (Ps
32:1-5 51:10), dans ses promesses (Esa 9:1 et suivant Esa 35:10
42:10-13 51:11 66:10), dans sa présence (Ps 4:6-8 16:11,
etc.).

Dieu se révélant d'une manière parfaite EN JESUS-CHRIST, c'est
celui-ci qui devient pour le chrétien d'une manière plus particulière
la source de la joie. La joie chrétienne a quelque chose de plus
intense, de plus profond, de plus pur que celle de la piété juive.
Elle est associée à la conversion (Ac 2:46 16:34,1Th 1:6) et au
don du Saint-Esprit (Ro 14:17,Ga 5:22,Eph 5:18-20); elle trouve
son aliment dans les triomphes du Christ sur la terre (Phi
1:18,Ac 11:23 15:3), dans les espérances célestes (Mt
25:21,23,Lu 10:20,Jn 4:36,Ro 12:12,1Pi 4:13), dans la communion
fraternelle (Ro 12:15,2Co 7,Phi 2:1-4, 2Jn 1:4, 3Jn 1:4), dans
l'amour du Christ (Jn 15:9-14,Ro 8:31,39)

L'Évangile ne prétend pas affranchir l'homme de LA SOUFFRANCE, mais,
au sein même de la souffrance, il apporte le secret de la joie et
parfois il en fait un sujet de joie. Jésus l'affirme dans le discours
qui inaugura son enseignement: «Heureux ceux qui pleurent, heureux
les persécutés» (Mt 5:4,10). Il le répète à la fin: «Votre
tristesse sera changée en joie» (Jn 16:20-22,24 Ro 5:3-5,11,1Pi 1:6-9,Jas 1:2).

Non seulement l'Écriture nous exhorte à la joie et nous en apporte le
secret, mais elle joint au précepte L'EXEMPLE,

(a) Le livre des Actes nous montre la joie surhumaine
des premiers chrétiens au milieu des persécutions et des
difficultés de toutes sortes (Ac 2:46 5:41 13:52).
L'apôtre Paul est devenu le modèle classique de cette joie qui
triomphe des tristesses du monde. L'épître aux Philippiens en
particulier, écrite pourtant à un des moments les plus douloureux de
la vie de l'apôtre, est un hymne de joie.

(b) La révélation la plus haute de la joie nous est
donnée par la vie de Jésus lui-même. Les évangélistes l'ont
dépeint plutôt sous l'aspect de 1' «homme de douleur». Ils avaient de
bonnes raisons pour cela. Mais il ne faut pas négliger un autre
aspect de la figure de Jésus, qui nous est révélé par une lecture
attentive des évangiles, le Jésus rayonnant. Celui qui a formulé les
Béatitudes (voir ce mot) s'y connaissait. Bien des détails des
évangiles laissent entendre que l'activité de Jésus s'est déroulée
dans la joie (Mr 2:18-22,Mt 6:16,25-34 11:16-19 Lu 10:21 Jn
2:1-11) La joie qui émanait de lui et qui contrastait avec
l'attitude des gens religieux de son entourage était, sans aucun
doute, un des secrets de son attrait sur les hommes. Pendant les
derniers jours de sa vie terrestre, elle ne s'est pas démentie. Dans
la chambre haute, il demande encore à Dieu pour ses disciples la
plénitude de sa joie (Jn 17:13, cf. Jn 15:11). Si Jésus a
été l'être le plus éprouvé et le plus affligé, il a été en même temps
le plus joyeux.

(c) La joie n'est-elle pas d'ailleurs un des attributs
de Dieu, et Jésus ne nous révèle-t-il pas dans les paraboles de
la brebis perdue et du fils perdu un Dieu qui souffre par amour, mais
qui, dans l'amour même, connaît, avec les anges, la plénitude de la
joie? (Lu 15:7,10,24)

Les biographies et les mémoires des CHRETIENS FERVENTS sont
remplis de témoignages de cette joie, qu'elle se manifeste éclatante
aux jours de la conversion, ou, calme et continue, dans le cours de
la vie chrétienne. Nous nous bornerons à en rappeler deux: L'histoire
de saint François d'Assise, par exemple, renferme une admirable
illustration, entre tant d'autres, de cette vérité que la joie la
plus haute s'atteint dans et par la souffrance. Alors que saint
François cheminait un jour avec frère Léon, il expliquait à ce
dernier que la joie chrétienne ne consistait pas dans la sainteté,
dans le don de guérison et de miracle, dans la science de tous les
mystères, ni même dans le pouvoir de convertir les hommes; et comme
le moine s'étonnait et demandait en quoi consiste donc la joie
parfaite, le saint reprit: «Si, au lieu de nous recevoir au couvent
où nous allons arriver, on nous jetait à la porte dans la neige et
dans le froid en nous rouant de coups, et si nous supportions cela
patiemment et gaiement en songeant aux souffrances du Christ et en
nous disant combien c'est chose bonne pour nous de souffrir par amour
pour lui, ô frère Léon, écoute-moi bien, c'est en cela que
consisterait la joie parfaite» (Fioretti, ch. IX).

Rappelons-nous enfin le cri pathétique qui termine le mémorial de
Pascal: «Joie, joie, joie, pleurs de joie.»

Voir Contentement d'esprit, Paix. Jean M.