ISAAC

Fils d'Abraham et de Sara.

1.
Son nom en hébreu est Yisekhaq, et l'analogie de ce
nom avec la racine sâkhaq (=rire) explique les nombreux passages
de l'histoire de ce patriarche où il est question de rires et de
plaisanterie (Ge 18:11-15 21:6 26:8).

2.
Les récits concernant Isaac (sur la valeur historique
des récits patriarcaux,voir Abraham, Genèse) sont empruntés
principalement à la source J. Ils sont d'ailleurs peu nombreux et
très fragmentaires. Presque partout la personnalité d'Isaac
n'apparaît qu'en fonction de celles d'Abraham et de Jacob. Toutefois
le témoignage que rend Jacob à la piété de son père (Ge
31:43,53) et surtout l'expression très célèbre et sûrement très
antique où il est parlé du «Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob»
prouvent que la postérité ne considérait pas Isaac comme un
personnage, et surtout comme un croyant, d'arrière-plan.

3.
Par rapport à son demi-frère Ismaël, fils d'Agar,
Isaac est dans une situation analogue à celles d'Abraham vis-à-vis de
son neveu Lot et de Jacob vis-à-vis de son frère Ésaü. Abraham,
Isaac, Jacob représentent l'authentique race hébraïque, tandis que
Lot, Ismaël, Ésaü personnifient des familles apparentées qui ont eu,
à côté d'Israël et le plus souvent en opposition avec lui, leur
existence propre. Certains historiens ont cru pouvoir conclure de
cette signification ethnique des traditions patriarcales que les
personnalités ici mises en avant n'avaient aucune réalité
individuelle, et ne faisaient que symboliser des collectivités très
anciennes. En ce qui concerne Ismaël (voir ce mot), une telle
conclusion est probablement légitime, car il ne nous est guère
rapporté de lui que des traits impersonnels (Ge 21:20) et des
données ethniques (Ge 25:12-17). Mais pour Isaac il en va
autrement; sa personnalité est plus nettement dessinée et la
tradition lui prête un caractère très particulier qui semble bien
être celui d'un homme plus que celui d'un peuple.

4.
Le trait distinctif de ce caractère d'Isaac, c'est la passivité.
Tout au long des récits qui nous parlent de lui, cette
tendance naturelle apparaît, à peine soulignée par les conteurs, mais
réelle. Lorsqu'Abraham s'apprête à sacrifier son fils sur le Morija,
la victime accepte son sort terrible (Ge 22:1,14). Lorsque le
fidèle serviteur ramène Rébecca du pays des ancêtres, Isaac accepte
la femme qui lui est ainsi donnée (Ge 24:62-67). Au foyer où
grandissent Ésaü et Jacob, le père se laisse dominer par son goût
pour la venaison, il ne fait rien pour contrecarrer les entreprises
suspectes du fils préféré de Rébecca (Ge 25:27-34). Et quand
ensuite, par un audacieux subterfuge, Jacob a réussi à capter à son
profit la bénédiction paternelle, Isaac est violemment ému par la
découverte de la tromperie, mais il ne réagit pas, il ne proteste
pas: Jacob a la bénédiction, il la gardera. Ainsi le veut l'opinion
ancienne d'après laquelle une bénédiction donnée agit à la façon d'un
opus ope-yatum ; mais ainsi le veut aussi pour une part le
caractère d'Isaac (Ge 27).

5.
Une mention spéciale doit être faite des récits
consacrés au séjour d'Isaac dans les marches méridionales de la
Palestine, à Guérar et à Béer-Séba (Ge 26). A travers les
flottements de la tradition, qui est ici pleine de doublets, et qui
fait tantôt d'Abraham, tantôt d'Isaac, tantôt des deux
successivement, les héros des événements dans lesquels intervient le
célèbre roi Abimélec, il est facile de discerner des faits
historiques certains. Il y a eu, dans ces régions, entre les
habitants du pays et les ancêtres d'Israël, des contestations portant
principalement sur les points d'eau, si importants pour les nomades
ou les semi-nomades. Dans ces contestations, le caractère d'Isaac est
toujours décrit de la même manière: il cède le terrain et les
précieuses sources, ce qui ne l'empêche pas de connaître une
magnifique prospérité et de voir finalement son alliance recherchée
par ses ennemis.

6.
Les renseignements nous manquent sur la fin de la vie
d'Isaac. Ce que P raconte de sa mort est tout conventionnel. Comme il
avait uni Ismaël et Isaac pour les derniers honneurs à
Abraham (Ge 25:6), P nous montre Ésaù et Jacob associés pour
l'enterrement d'Isaac (Ge 35:29). Il est remarquable qu'aucune
mention ne soit ici faite de la sépulture familiale de Macpéla.

A. M.