ÉVANGÉLISTE

I Nouveau Testament.

Porteur de l'Évangile (voir ce mot). Le titre d'Évangéliste, dans
Ac 21:8,Eph 4:11,2Ti 4:5, s'applique à une catégorie d'hommes
travaillant à propager le message chrétien.

L'étude de ces passages semble indiquer que ce qui distingue ces
hommes des autres ouvriers de l'Évangile, c'est à la fois l'origine
de leur vocation et la nature de leur message. Ils diffèrent d'abord
des apôtres en ce que leur vocation est suscitée par des
intermédiaires humains; ils se trouvent dès lors sous la dépendance
morale de ceux-ci. Le terme n'est d'ailleurs pas employé exactement
avec la même valeur dans ces trois passages, comme nous allons le
voir. L'origine doit sans doute en être cherchée dans certains
milieux palestiniens où l'on éprouva vite le besoin de distinguer des
apôtres certains propagateurs de l'Évangile, plus modestes peut-être,
moins connus en tout cas que les disciples de Jésus. Ac 21:8
paraît être le plus ancien texte qui contienne le mot.
Ce n'est donc pas Paul qui l'invente, mais déjà, par suite de
controverses avec les apôtres de Jérusalem qui semblaient douter
qu'il eût été appelé directement par le Seigneur comme eux-mêmes,
Paul avait été amené à définir l'apostolat, et ceci en fonction du
sien. Dès lors le terme d'apôtre (voir ce mot) ne désignait, sauf
exception, que les Douze et Paul, ceux qui avaient été appelés
directement par Jésus. Cependant il existait à côté d'eux un nombre
assez grand de pionniers de l'Évangile dont le rôle doit avoir été
beaucoup plus important que celui que nous retracent les livres du
N.T.

L'habitude s'établit peu à peu de les désigner par un nom qui
rappelait leur activité principale, mais non unique, de prédicateurs
de l'Évangile de Jésus. Tel est Philippe, tel est aussi Timothée,
compagnon de Paul installé par lui dans ses fonctions d'évangéliste.
Paul fut amené lui-même à donner ce nom à ses collaborateurs: au
début, comme l'indique la première énumération qu'il fait des dons
conférés dans l'Église par le Christ (1Co 12:28), il n'est pas
question de les distinguer des apôtres. Puis, par suite de la
définition de l'apostolat qu'il avait été amené à donner, le terme
était apparu et il le cite dans sa deuxième énumération, Eph
4:11. Mais rien n'autorise à croire que dans sa pensée il y eût
comme une hiérarchie de fonctions: il y avait plutôt une différence
dans l'origine de la vocation. Cette différence conférait à l'apôtre
une autorité incontestable sur l'évangéliste, mais celui-ci dans sa
sphère pouvait remplir toutes les fonctions d'un apôtre.

En général l'évangéliste est un «itinérant»; il fait de la
mission intérieure ou extérieure. Philippe en est le type (Ac
8:4,5,12,35,40). Mais il pouvait parfaitement bien être mis à la
tête d'une communauté; c'est le cas de Timothée, qui, après avoir
accompagné Paul dans ses voyages (Ac 16:8), remplit les
fonctions de pasteur d'Église. Et il lui sera recommandé à la fois de
«reprendre, exhorter, censurer...toujours en instruisant, et de
remplir ses devoirs d'évangéliste» (2Ti 4:2-5). D'ailleurs pour
Paul, à la fois le plus savant des docteurs, le plus grand des
apôtres et le prince des évangélistes, le ministère pastoral est
inséparable de celui d'évangéliste, le devoir d'instruction et de
conservation inséparable de celui de conquête et de création. Paul ne
conçoit pour personne de limitation du champ d'action qui est le
monde.

Les épîtres à Tite et à Timothée montrent d'ailleurs que
l'évangéliste organise les communautés, institue les évêques par
l'imposition des mains (1Ti 5:22 3:2 et suivants). Il en
institue dans chaque ville, pourvoit à leur entretien (1Ti
5:17); il a la direction de l'Église par suite de son «charisme»
(voir ce mot), qui est la prédication. C'est dire la place de plus en
plus grande que prend l'évangéliste (car il ne faut pas oublier que
les épîtres pastorales sont plus tardives que les grandes épîtres
pauliniennes). Ici ne subsiste plus aucun doute dans l'esprit des
contemporains: l'origine du ministère de Timothée est
humaine (2Ti 1:6). Alors que c'est le Christ qui a institué
Paul, c'est Paul qui a institué Timothée.

Le nombre des évangélistes des premiers temps dut aller
rapidement en augmentant: quelques noms seulement nous sont parvenus;
mais, d'une part le fait que les apôtres sont restés quelque temps à
Jérusalem, laissant à Paul la mission extérieure, d'autre part
l'extraordinaire rapidité avec laquelle l'incendie s'alluma de tous
côtés dans le monde, supposent des prédicateurs, des témoins arrivant
partout à la fois. Ce fut le rôle, immense, n'en doutons pas, des
évangélistes.

Pour l'emploi du mot Évangéliste au sens d'auteur d'un
évangile,voir Évangile, II

II Aujourd'hui.

Ce n'est plus l'origine de la vocation qui distingue l'évangéliste
des autres ministres de l'Évangile; le mot sert à désigner une
catégorie d'hommes qui se sentent appelés au ministère particulier de
la conquête des âmes et qui n'ont pas passé comme les pasteurs par le
cycle complet des études générales et théologiques. Ils sont soumis à
des études simplifiées et obtiennent après examen un diplôme spécial.
Les dames peuvent obtenir ce diplôme et c'est ainsi que nos Églises
comptent un certain nombre de dames évangélistes. Doués de dons
particuliers, ces évangélistes peuvent être des ouvriers de premier
ordre dans les oeuvres d'évangélisation. D'ailleurs les nécessités
actuelles tendent à donner aux vocations pastorales un caractère de
plus en plus nettement missionnaire, et imposent de plus en plus au
ministère pastoral la préoccupation de l'évangélisation à côté de la
cure d'âme et de l'instruction. La synthèse admirablement réalisée
par l'apôtre Paul n'est-elle pas l'idéal de tout serviteur de Dieu?
De telle sorte que se refait en arrière le chemin suivi au début: la
distinction entre pasteur et évangéliste tend à diminuer et le
pasteur, comprenant que l'Église sera missionnaire ou ne sera pas, ne
laissera plus aux seuls évangélistes le souci de la conquête; il
conciliera le ministère purement pastoral avec celui d'évangéliste,
il fera sienne la pensée de l'apôtre: «Malheur à moi si je
n'évangélise!» (1Co 9:16).

Le mot Évangélisation est un terme moderne; il ne se trouve
pas dans le N.T., où l'on ne trouve, comme dérivés d'Évangile,
que les termes évangéliser et évangéliste. Il désigne
l'action de porter le message chrétien à des contrées qui lui sont
étrangères. Si le terme est inconnu des premiers chrétiens, il n'en
résume pas moins le contenu de la plupart des livres du N.T. Les
évangiles eux-mêmes sont imprégnés de cette préoccupation; les Actes
sont les annales de l'évangélisation du monde juif et païen; la
plupart des épîtres, pauliniennes et autres, sont en partie
consacrées à ce problème: pourquoi et comment évangéliser le monde
païen? L'histoire de cette évangélisation nous est d'ailleurs encore
imparfaitement connue; il y a des traditions et des souvenirs mais
pas assez de sources certaines pour cette histoire qui, lorsqu'elle
sera faite, sera probablement à la gloire de ces humbles pionniers
que furent les évangélistes des premiers siècles.

Aujourd'hui, le terme est réservé aux efforts faits à l'intérieur
du pays par des Sociétés, spécialisées et outillées pour cela, en vue
de la diffusion de l'Évangile parmi des populations indifférentes à
toute religion ou dont la religion consiste en superstitions plus ou
moins grossières. Er. B. Voir Prédication; Témoin, parag. 4.