DUR, DURETÉ

Ces termes ne sont guère pris dans la Bible au sens propre (ex.: la
pierre dure, Sag 11:4). Au sens fig., ils peuvent représenter la
qualité morale soit de la fermeté contre le danger ou le mal (Eze
3:9), soit de la discipline sur soi-même (1Co 9:27). Lorsqu'il
s'agit des événements, des circonstances, ce qui est dur peut
représenter ce qui est difficile (Ac 26:14), désagréable (De
15:18), ou pénible: travaux (Sag 19:16), épreuves (Ps 60:5),
épée symbolique du châtiment de Dieu (Esa 27:1), maître chargé
par lui de punir (Esa 19:4); la servitude (De 26:6) est
quelquefois décrite sous l'image du joug dur, c-à-d. pesant (1Ro
12:4), auquel Jésus oppose son joug (voir ce mot), qui est doux et
léger (Mt 11:30).

Le plus souvent la dureté, antithèse de la douceur (voir ce mot),
est un défaut de la sensibilité, manque de coeur ou traitements
impitoyables, dont les nuances sont rendues dans nos traductions par
divers qualificatifs: rude (Ge 42:7-30), rigoureux (1Ro
14:6), sévère (1Sa 20:10), violent (2Sa 19:43),
cruel;voir (Ge 49:7) Cruauté. La morale israélite réprouve les
paroles dures (Pr 15:1), la dureté du riche pour le
pauvre (Pr 18:23), et la loi interdit au maître d'être dur pour
l'esclave (Le 25:46). L'antiquité considérait l'autruche (voir
ce mot) comme dure pour ses petits (Job 39:19). Des exemples de
dureté sont ceux de Nabal (1Sa 25:3), de Roboam (1Ro
12:13), des mauvais bergers d'Israël (Eze 34:4); saint Paul en
prévoit parmi les désordres des temps difficiles de l'avenir (2Ti
3:3). Les condamnations les plus nombreuses portent sur la dureté
consciente et volontaire du visage (Jer 5:3), du coeur (Ps
81:13,Mr 10:5 16:14 etc.), de l'intelligence (2Co 3:14), plus
généralement appelée endurcissement (voir ce mot).

En deux occasions l'accusation de dureté est un prétexte du
pécheur dans sa résistance aux appels de Dieu. Le discours de Jésus
sur le pain de vie, qui annonce son sacrifice et la communion en son
sang, provoque la protestation de plusieurs disciples contre «cette
parole dure, qu'on ne peut écouter» (Jn 6:60). Le Seigneur
lui-même, dans la parabole des talents (Mt 25:24) et dans celle
des mines (Lu 19:21 et suivant), attribue au mauvais serviteur
le mauvais prétexte que son maître est un «homme dur».

L'adjectif grec employé ici n'est pas le même dans les deux
évangiles:

Le sklèros de Matthieu évoque, comme l'hébreu qâckèh
des textes de l'A.T., une image empruntée au toucher:
l'idée de sécheresse et d'aspérité au contact désagréable; d'où un
caractère aux frottements difficiles, et même, le terme étant
ordinairement associé dans les écrits anciens à des défauts ou des
vices grossiers, un être dénaturé, intraitable, intolérable. Une
épigramme du I er siècle parle d'un enfant qui rapporte des durs
pugilats un esprit échauffé; la lettre d'Aristée (même siècle)
qualifie les rois «sauvages et durs»

L 'austèros de Luc évoque une image empruntée
au goût: celle de l'aigreur astringente, de l'acidité qui fait
contracter la langue et le palais; au point de vue moral, il
s'applique à ce qui est trop strict, exigences exagérées,
exactions, comme cela ressort de l'emploi de cette épithète dans les
documents du temps. Dans un diplôme militaire, l'empereur Adrien,
parlant de règlements relatifs à ses troupes, se réjouit de pouvoir
interpréter d'une manière plus humaine (grec philanthrope) ces règles
trop dures (grec austères) établies par les autocrates ses
prédécesseurs; une lettre de ce même II e siècle, annonçant à un ami,
employé aux finances d'un temple, la visite d'un inspecteur du
gouvernement, le presse de voir à ce que ses livres soient bien en
ordre, «car l'homme est par trop dur!» (grec austère). Tous ces
exemples illustrent bien l'une et l'autre paraboles; si les deux
adjectifs grecs précités diffèrent par l'étymologie, l'un répondant à
âpre, l'autre à acre, ils sont équivalents entre eux dans
l'injuste reproche du mauvais serviteur contre le maître qu'il
prétend inhumain. On voit par là que la traduction «sévère» (Ost.,
Sg., etc.) est un peu faible pour Vaustèros de Luc qui est mieux
rendu par «rigide» (Oltr., Cramp.), et même par «homme de rigueur,
homme terrible» (Lasserre); le français «austère», qui désigne
aujourd'hui la qualité morale de la stricte intégrité aussi bien que
le défaut correspondant, le moralisme sans indulgence, affaiblirait
encore davantage le terme original; la meilleure traduction semble
donc être tout simplement «homme dur» (Vers. Syn.).--Voir Trench,
Syn. N.T., parag. XIV; VGT, pp. 93, 578. Jn L.