CRUAUTÉ
Ce vice, par lequel on prend plaisir à faire souffrir, n'est guère
nommé dans la Bible; l'adjectif (hébreu akzâr) y paraît quelques
foiss, dans les condamnations de la fureur cruelle (Pr 27:4), de
l'homme cruel (Pr 12:10), qui sera châtié (Pr 11:17), ou
qui sera lui-même employé pour châtier le pécheur (Pr 5:9
17:11,Esa 19:4,Jer 6:23 30:14). Dans ses objurgations, Job reproche
à Dieu d'être cruel envers lui (Job 30:21); le jour de JHVH est
annoncé comme devant être cruel contre Baby-lone (Esa 13:9). St
Paul prédit les méfaits de gens cruels, de loups cruels (Ac
20:29,2Ti 3:3). Pour la cruauté prétendue de l'autruche,voir (La
4:3,Job 39:19) ce mot. Enfin, par métaphore, il est question d'un
cruel poison (De 32:33).
Mais si les termes sont rares, les exemples de cruauté ne le sont
pas dans ces livres sacrés, où palpitent des siècles de la vie
antique orientale telle que nous la connaissons aussi par
d'innombrables documents profanes. L'un des plus anciens morceaux de
la Bible est un chant sauvage de vendetta, où Lémec proclame le droit
aux représailles (Ge 4:23 et suivant), régime inique de la
vengeance arbitraire et du bon plaisir du plus fort. La coutume de
l'interdit (voir ce mot), sans être cruelle en ce sens qu'elle
exprimait non la soif du sang mais le sacrifice impitoyable à la
divinité (De 20:17,Jos 6:21), attribuait cependant à JHVH des
atrocités. Dans 2Sa 12:31, la rectification du texte enlève à
David la responsabilité d'un supplice épouvantable (voir Four et
Herse). Mais les Israélites vivaient entre les Cananéens, les
Edomites, les Philistins, les Caldéens, etc., tous connus pour la
cruauté de leurs moeurs, militaires et civiles, dont les exemples
abondent dans l'A.T.; ainsi s'expliquent, sans se justifier,
certaines imprécations comme celles de Ps 137:7-9 et certaines
traditions nationales comme celle des massacres commis par les Juifs
à Suse (Est 9).
Les pires cruautés décrites dans la Bible sont sans doute les
persécutions de l'époque des Macchabées; elles remplissent les deux
livres apocr. de ce nom, qui ont le droit de dénoncer «le tyran cruel
Antiochus», et ses «actes de cruauté» (2Ma 7:27 12:5 13:9
etc.). Il faut citer aussi les sanguinaires Hérode le Grand (Mt
2:13-18). Hérode Antipas avec Hérodias (Mr 6:21,28), Ponce
Pilate (Lu 13:1). «Sortant péniblement de la barbarie dans
laquelle elle se trouvait plongée, la race des hommes a été appelée à
parcourir un long chemin.
La loi, sous l'ancienne alliance, en a marqué les étapes
successives. Passant par la règle du talion, l'humanité s'est
graduellement élevée jusqu'à ce que, sous l'action du souffle
prophétique, un nouveau degré fût franchi, et que retentît le
commandement de l'amour. Jésus, couronnant l'oeuvre de la loi et des
prophètes, a non seulement proclamé à nouveau ce principe divin, il
l'a incarné en lui-même, en sa vie et en sa mort.» (L. Gautier.)
Entre l'esprit du Christ et l'esprit même d'Élie, il y a tout l'abîme
de la révélation de l'Évangile (cf. 1Ro 18:40,2Ro 1:10,12 et
Lu 9:55).
La cruauté est incompatible avec l'amour chrétien, qui «ne fait
rien de malhonnête, ne se réjouit pas de l'injustice, mais excuse
tout, croit tout, espère tout, supporte tout» (1Co 13:5-7). Jn L.