LA BIBLE TRADUITE SUR LA VULGATE

PAR LE MAISTRE DE SACI (1759)

Numérisation Yves PETRAKIAN Mars 2007 - France

 


 

ECCLESIASTE

 

Ce livre est appelé par les Grecs Ecclésiaste, et par les Hébreux Qohelet c'est-à-dire Orateur, Prédicateur, ou celui qui assemble ou qui instruit dans l'assemblée des peuples; et c'est sans doute dans le même sens que l'auteur du trentième chapitre du livre des Proverbes s'est surnommé, v. 1, Agur, qui signifie aussi celui qui assemble, et qui instruit. L'auteur de celui-ci prêche en effet contre la vanité des créatures et contre le néant des plaisirs, des honneurs, des richesses qui séduisent les hommes en ce monde; c'est le néant qu'il assure y avoir trouvé par sa propre expérience; car, après avoir passé la plus grande partie de sa vie dans l'usage de tout ce qu'il y a de plus grand, de plus agréable, et de plus capable d'enchanter les sens, et de satisfaire, s'il étoit possible, la cupidité du coeur de l'homme, il avoue qu'après en avoir usé, il n'y a trouvé autre chose que vanité et affliction d'esprit. C'est ce que cet auteur a uniquement intention de prouver, pour désabuser les hommes de l'estime qu'ils font de ces faux biens, et pour les porter à en rechercher en Dieu de plus solides par une fidèle obéissance à sa loi et à ses commandements. Il montre aux hommes charnels et aux amateurs de ce monde, en répondant à leurs objections. que toutes les créatures, toutes les choses sensibles, tout ce qui concerne la vie présente, et même leurs folles pensées, passent rapidement, s'anéantissent, et se perdent dans un oubli éternel; mais qu'il vrendra un temps où Dieu jugera les hommes, et qu'alors tout sera réel, fixe, permanent, et éternel.

Les anciens Juifs et les saints Pères n'ont point mis en doute que ce livre ne fut l'ouvrage de Salomon, quoiqu'il ne porte pas son nom, ainsi que celui des Proverbes, et du Cantique des cantiques. Il s'est suffisamment nommé sous la qualité de fils de David et de roi de Jérusalem, et le portrait qu'il fait de soi-même, chap. I, v. 1, 12, 13, 14, 16 et 17, chap. II, v. 1, 4, 5, jusqu'au v. 31, chap.VII, v. 24, et chap. XII, v. 9, dans lesquels il décrit ses différents états, la situation de son âme, les dispositions de son coeur, sa chute, et même ses écrits, le font assez reconnoître, et ne permettent pas qu'on puisse attribuer ce livre à d'autres que ce prince sage.

 

 

CHAPITRE I

 

Tout ce qui est ici-bas n'est que vanité. Rien de nouveau sous le soleil. Le sagesse même et la science sources de peines et d'affliction.

 

1 Paroles de l'Ecclésiaste, fils de David et roi de Jérusalem :

2 Vanité des vanités, dit l'Ecclé- siaste; vanité des vanités, et tout n'est que vanité.

3 Que retire l'homme de tout le travail qui l'occupe sous le soleil?

4 Une génération passe, une autre lui succède; mais la terre demeure ferme pour jamais.

5 Le soleil se lève et se couche, et il retourne d'où il étoit parti ; et re- naissant du même lieu,

6 Il prend son cours vers le midi, et tourne vers le nord. L'esprit tour- noie de toutes parts, et il revient sur lui-même par de longs circuits.

7 Tous les fleuves entrent dans la mer, et la mer n'en regorge point ; les fleuves retournent au même lieu d'où ils étoient sortis pour couler encore.

8 Toutes les choses du monde sont difficiles; l'homme ne les peut expli- quer par ses paroles. L'oeil ne se rassasie point de voir, et l'oreille ne se lasse point d'écouter.

9 Qu'est-ce qui a été autrefois? c'est ce qui doit être à l'avenir. Qu'est-ce qui s'est fait? c'est ce qui se doit faire encore.

10 Rien de nouveau sous le soleil, et nul ne peut dire : Voilà une chose nouvelle ; car elle a été déjà dans les siècles qui se sont passés avant nous.

11 On ne se souvient plus de ce qui a précédé; et de même les choses qui doivent arriver après nous seront oubliées de ceux qui viendront ensuite.

12 Moi, l'Ecclésiaste, j'ai été roi d'Israël dans Jérusalem ;

13 J'ai résolu en moi-même de rechercher et d'examiner avec sagesse ce qui se passe sous le soleil. Dieu a donné aux enfants des hommes cette fâcheuse occupation qui les exerce pendant leur vie.

14 J'ai vu tout ce qui se fait sous le soleil, et j'ai trouvé que tout est vanité et affliction d'esprit.

15 Les âmes perverties se corrigent difficilement, et le nombre des insensés est infini.

16 J'ai dit dans mon coeur : Je suis devenu grand, et j'ai surpassé en sagesse tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem; mon esprit a contemplé les choses avec une grande sagesse, et j'ai beaucoup appris.

17 J'ai appliqué mon coeur pour connoître la prudence et la doctrine, les erreurs et l'imprudence; et j'ai reconnu qu'en cela même il y a bien de la peine et de l'affliction d'esprit,

18 Parce qu'une grande sagesse est accompagnée d'une grande indignation, et que plus on a de science, plus on a de peine.

 

CHAPITRE II

 

Vanité des plaisirs, des richesses, des bâtiments. Avantage de la sagesse. Vanité d'amasser des richesses pour un héritier inconnu.

 

1 J'ai dit en moi-même J'irai, et je nagerai dans les délices, et je jouirai des biens ; et j'ai reconnu que cela même n'est que vanité.

2 J'ai appelé le rire une folie, et j'ai dit à la joie : Pourquoi vous trompez-vous si vainement ?

3 J'ai médité en moi-mème de retirer ma chair du vin, pour porter mon esprit à la sagesse, et pour éviter l'imprudence, jusqu'à ce que j'eusse reconnu ce qui est utile aux enfants des hommes, et ce qu'ils doivent faire sous le soleil pendant les jours de leur vie.

4 J'ai fait faire des ouvrages magnifiques. j'ai bâti des maisons, j'ai planté des vignes;

5 J'ai fait des jardins et des vergers, où j'ai mis toutes sortes d'arbres;

6 J'ai fait faire des réservoirs d'eau pour arroser mes plants de jeunes arbres ;

7 J'ai eu des serviteurs et des servantes, et un grand nombre d'esclaves nés en ma maison, un grand nombre de boeufs, et des troupeaux de brebis, plus que n'en ont jamais eu tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem ;

8 J'ai amassé une grande quantité d'or et d'argent, et les richesses des rois et des provinces; J'ai eu des musiciens et des musiciennes, et tout ce qui fait les délices des enfants des hommes, des coupes et des vases pour servir le vin ;

9 Et j'ai surpassé en richesses tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem; et la sagesse est demeurée toujours avec moi.

10 Je n'ai rien refusé à mes yeux de tout ce qu'ils ont désiré, et j'ai permis à mon coeur de jouir de toutes sortes de plaisirs, et de prendre ses délices dans tout ce que j'avois préparé; et j'ai cru que mon partage étoit de jouir ainsi de mes travaux.

11 Et tournant ensuite les yeux vers tous les ouvrages que mes mains avoient faits, et tous les travaux où j'avois pris une peine si inutile, j'ai reconnu qu'il n'y a que vanité et affliction d'esprit dans toutes ces choses, et que rien n'est stable sous le soleil.

12 J'ai passé à la contemplation de la sagesse, des erreurs, et de l'imprudence. Qu'est l'homme, dis-je. pour pouvoir suivre le roi qui l'a créé?

13 Et j'ai reconnu que la sagesse a autant d'avantage sur l' imprudence, que la lumière en a sur les ténèbres.

Les yeux du sage sont à sa tête; l'insensé marche dans les ténèbres ; et j'ai reconnu qu'ils meurent tous deux l'un comme l'autre.

15 J'ai donc dit en moi-même : je dois mourir aussi bien que l'insensé, que me servira de m'être plus appliqué à la sagesse? Et m'étant entretenu de ceci en mon esprit, j'ai reconnu qu'il y a en cela même de la vanité,

16 Car la mémoire du sage ne sera pas éternelle, non plus que celle de l'insensé, et les temps à venir enseveliront tout également dans l'oubli : l'homme savant meurt comme l'ignorant.

17 C'est pourquoi la vie m'est devenue ennuyeuse, considérant que toutes sortes de maux sont sous le soleil, et que tout n'est que vanité et affliction d'esprit.

18 J'ai regardé ensuite avec détestation toute cette application si grande avec laquelle j'avois tant travaillé sous le soleil, devant laisser après moi un héritier,

19 Qui deviendra le maître de tous les ouvrages où je me suis appliqué avec tant de peine et de travail, sans que je sache s'il doit être sage ou insensé; et y a-t-il      rien de si vain?

20 C'est pourquoi j'ai quitté toutes ces choses, et mon coeur a renoncé à se tourmenter davantage sous le soleil.

21 Car après qu'un homme a bien travaillé à acquérir la sagesse et la science, et qu'il s'est donné bien de la peine, il laissera tout ce qu'il a acquis à qui n'aimera que l'oisiveté. Tout cela donc est une vanité et un grand mal.

22 Car que retirera l'homme de tout son travail, et de l'affliction de son esprit, avec laquelle il s'est tourmenté sous le soleil?

23 Tous ses jours sont pleins de douleurs et de misère, et il n'a point de repos dans son âme, même pendant la nuit. Et n'est-ce pas là une vanité?

24 Ne vaut-il pas mieux manger et boire, et faire jouir son âme du fruit de ses travaux? Et ceci vient de la main de Dieu.

25 Qui se rassasiera et jouira de toutes sortes de délices autant que moi?

26 Dieu a donné à l'homme qui lui est agréable la sagesse, la science, et la joie; et il a donné au pécheur l'affliction et les soins inutiles, afin qu'il amasse sans cesse, et qu'il ajoute bien sur bien, et le laisse à un homme qui sera agréable à Dieu; mais cela même est une vanité, et un tourment d'esprit fort inutile.

 

CHAPITRE III

 

Toutes choses ont leur temps. Étude des choses naturelles vaine. Les hommes et les bêtes meurent également.

 

1 Toutes choses ont leur temps, et tout passe sous le ciel après le terme qui lui a été prescrit.

2 Il y a temps de naître, et temps de mourir ; temps de planter, et temps d'arracher ce qui a été planté.

3 Il y a temps de tuer, et temps de guérir; temps d'abattre, et temps de bâtir.

4 Il y a temps de pleurer, et temps de rire; temps de s'affliger, et temps de sauter de joie.

5 Il y a temps de jeter les pierres et temps de les ramasser ; temps d'embrasser, et temps de s'éloigner des embrassements.

6 Il y a temps d'acquérir, et temps de perdre; temps de conserver, et temps de rejeter.

7 Il y a temps de déchirer, temps de se rejoindre; temps de se taire, et temps de parler.

8 Il y a temps pour l'amour, et temps pour la haine; temps pour la guerre, et temps pour la paix.

9 Que retire l'homme de tout son travail?

10 J'ai vu l'occupation que Dieu a donnée aux enfants des hommes, et qui les travaille pendant leur vie.

11 Tout ce qu'il a fait est bon en son temps, et il a livré le monde à leurs disputes, sans que l'homme puisse reconnoître les ouvrages que D'eu a créés depuis le commencement du monde jusqu'à la fin.

12 Et j'ai reconnu qu'il n'y a rien de meilleur que de se réjouir, et de bien faire pendant sa vie;

13 Car tout homme qui mange et qui boit, et qui retire son bien de son travail, reçoit cela par un don de Dieu.

14 J'ai appris que tous les ouvrages que Dieu a créés demeurent à perpétuité ; et que nous ne pouvons ni rien ajouter ni rien ôter à tout ce que Dieu a fait, afin qu'on le craigne,

15 Ce qui a été est encore; ce qui doit être a déjà été et Dieu rappelle ce qui est passé.

16 J'ai vu sous le soleil l'impiété à la place du jugement, et l'iniquité à la place de la justice;

17 Et j'ai dit en mon coeur : Dieu jugera le juste et l'injuste, et alors ce sera le temps de toutes choses.

18 J'ai dit en mon coeur touchant les enfants des hommes, que Dieu les éprouve, et qu'il fait voir qu'ils sont semblables aux bêtes.

19 C'est pourquoi les hommes meurent comme les bêtes, et leur sort est égal. Comme l'homme meurt, les bêtes meurent aussi. Les uns et les autres respirent de même, et l’homme n'a rien de plus que la bête: tout est soumis à la vanité.

20 Et tout tend en un même lieu. Ils ont tous été tirés de la terre, et ils retourneront, tous dans la terre.

21 Qui sait si l'âme des enfants des hommes monte en haut, et si l'âme des bêtes descend en bas?

22 Et j'ai reconnu qu'il n'y a rien de meilleur à l'homme que de se réjouir dans ses oeuvres, et que c'est là son partage, car qui le pourra mettre en état de connoître ce qui doit arriver après lui ?

 

CHAPITRE IV

 

Violences et jalousies des hommes. Oisivete des insensés. Folie des avares. Avantages de la société. Vanité de la souveraine puissance. Obéissance préférable eux sacrifices.

 

1 J'ai porté mon esprit ailleurs ; j'ai vu les oppressions qui se font sous le soleil, les larmes des innocents qui n'ont personne pour les consoler, et l'impuissance où ils sont de résister à la violence, abandonnés qu'ils sont de tout secours.

2 Et j'ai préféré l'état des morts à celui des vivants;

3 Et j'ai estimé plus heureux que les uns et les autres celui qui n'est pas encore né, et qui n'a point vu les maux qui se font sous le soleil.

4 J'ai considéré aussi tous les travaux des hommes, et j'ai reconnu que leur industrie est exposée à l'envie des autres, et qu'ainsi cela même est une vanité et une inquiétude inutile.

5 L'insensé met ses mains l'une dans l'autre, et il mange sa propre chair en disant :

6 Un peu dans le creux de la main vaut mieux avec du repos, que plein les deux mains avec travail et affliction d'esprit.

7 En considérant toutes choses, j'ai trouvé encore une autre vanité sous le soleil :

8 Tel est seul, et n'a personne avec lui, ni enfant, ni frère, qui néanmoins travaille sans cesse; ses yeux sont insatiables de richesses ; et il ne lui vient point dans l'esprit de se dire à lui-même : Pour qui est-ce que je travaille, et pourquoi me priver moi-même de l'usage de mes biens? C'est là encore une vanité et une affliction bien malheureuse.

9 Il vaut donc mieux être deux ensemble que d'être seul; car ils tirent avantage de leur société.

10 Si l'un tombe, l'autre le soutient. Malheur à l'homme seul ; car lorsqu'il sera tombé, il n'aura personne pour le relever.

11 Si deux dorment ensemble, ils s'échauffent l'un l'autre; mais comment un seul s'échauffera-t-il?

12 Si quelqu'un a de l'avantage sur l'un des deux, tous deux lui résistent; un triple cordon se rompt difficilement.

13 Un enfant pauvre, mais qui est sage, vaut mieux qu'un roi vieux et insensé qui ne sauroit rien prévoir pour l'avenir.

14 Car quelquefois tel est dans la prison et dans les chaînes qui en sort pour être roi ; et tel est né roi, qui tombe dans une extrême pauvreté.

15 J'ai vu tous les hommes vivants qui marchent sous le soleil avec le second jeune homme qui doit se lever en la place de l'autre.

16 Tous ceux qui ont été avant lui font un peuple infini en nombre, et ceux qui doivent venir après ne se réjouiront point en lui; mais cela même est vanité et affliction d'esprit.

17 Considérez où vous mettez le pied lorsque vous entrez dans la maison du Seigneur, et approchez-vous pour écouter. Car l'obéissance vaut beaucoup mieux que les victimes des insensés, qui ne connoissent pas le mal qu'ils font.

 

 

CHAPITRE V

 

Être circonspect dans ses paroles. S'acquitter de ses voeux. Se point se scandaliser du renversement de la justice. L'avare est insatiable. Riche malheureux au milieu de ses richesses.

 

1 Ne dites rien inconsidérément, et que votre coeur ne se hâte point de proférer des paroles devant Dieu; car Dieu est dans le ciel, et vous sur la terre; c'est pourquoi parlez peu.

2 La multitude des soins produit les songes, et l'imprudence se trouve dans la multitude des paroles.

3 Si vous avez fait un voeu à Dieu, ne différez point de vous en acquitter: car la promesse infidèle et imprudente lui déplait ; mais accomplissez tous les voeux que vous aurez faits.

4 Il vaut beaucoup mieux ne point faire de voeux, que d'en faire et de ne les pas accomplir.

5 Que la légèreté de votre bouche ne soit pas à votre chair une occasion de tomber dans le péché ; et ne dites pas devant lange : il n’y a point de providence ; de peur que Dieu, irrité

contre vos paroles, ne détruise tous les ouvrages de vos mains.

6 Où il y a beaucoup de songes, il y a aussi beaucoup de vanité et de discours sans fin ; pour vous, craignez Dieu.

7 Si vous voyez l'oppression des pauvres, la violence qui règne dans les jugements, et le renversement de la justice dans une province, que cela ne vous étonne pas; car celui qui est élevé en a un autre au-dessus de lui, et il y en a encore d'autres qui sont élevés au-dessus d'eux ;

8 Et, de plus, il y a un roi sur tout le pays qui lui est assujetti.

9 L'avare n'aura jamais assez d'argent et celui qui aime les richesses n'en recueillera point de fruit; c'est donc là encore une vanité.

10 Où il y a beaucoup de bien, il y a aussi beaucoop de personnes pour le manger. De quoi donc sert-il à celui qui le possède, sinon qu'il voit de ses yeux beaucoup de richesses?

11 Le sommeil est doux à celui qui travaille, qu'il ait peu ou beaucoup mangé; mais l'excès de nourriture empêche le riche de dormir.

12 Il y a encore une autre misère bien fâcheuse que j'ai vue sous le soleil : des richesses conservées avec soin pour le tourment de celui qui les possède.

13 Il les voit périr avec une extrême affliction : il a mis au monde un fils qui sera réduit à la dernière pauvreté.

14 Comme il est sorti nu du sein de sa mère, il y retournera de même, et il n'emportera rien avec lui de son travail.

15 C'est là vraiment une maladie bien digne de compassion : il s'en retournera comme il est venu. De quoi lui sert donc d'avoir tant travaillé en vain?

16 Tous les jours de sa vie il a mangé dans les ténèbres, dans un embarras de soins, dans la misère et dans le chagrin.

17 J'ai cru donc qu'il est bon qu'un homme mange et boive, et qu'il se réjouisse dans le fruit qu'il tire de tout son travail qu'il endure sous le soleil, pendant les jours que Dieu lui a donnés pour la durée des a vie, et que c'est là son partage.

18 Et quand Dieu a donné à un homme des richesses, du bien, et le pouvoir d'en manger, de jouir de ce qu'il a eu en partage, et de trouver sa joie dans son travail, cela même est un don de Dieu.

19 Car il se souviendra peu des jours de sa vie, parce que Dieu occupe son coeur de délices.

 

CHAPITRE VI

 

Malheureuse condition de l'avare :  il a du bien, et il n'ose en jouir.

 

1 Il y a encore un autre mal que j'ai vu sous le soleil, et qui est ordinaire parmi les hommes :

2 Un homme à qui Dieu a donné des richesses, du bien, de l'honneur, et à qui il ne manque rien, pour la vie, de tout ce qu'il peut désirer; et Dieu ne lui a point donné le pouvoir d'en manger, mais un étranger dévorera tout; c'est là une vanité et une grande misère.

3 Quand un homme auroit eu cent enfants, qu'il auroit vécu beaucoup d'années, et qu'il seroit fort avancé en âge; si son âme n'use point des biens qu'il possède, et qu'il soit même prive de la sépulture. je ne crains pas d'avancer de cet homme qu'un avorton vaut mieux que lui.

4 Car c'est en vain qu'il est venu au monde, il s'en retournera dans les ténèbres, et son nom sera enseveli dans l'oubli.

5 Il n'a point vu le soleil, et n'a point connu la différence du bien et du mal.

6 Quand il auroit vécu deux mille ans, s'il n'a point joui de ses biens, tous ne vont-ils pas au même lieu?

7 Tout le travail de l'homme est pour sa bouche; mais son âme n'en sera pas remplie.

8 Qu'a le sage de plus que l'insensé? qu'a le pauvre au-dessus de lui, sinon qu'il va au lieu où est la vie?

9 Il vaut mieux voir ce que l'on désire, que de souhaiter ce que l'on ignore. Mais cela même est une présomption d'esprit.

10 Celui qui doit être est déjà connu par son nom ; on sait qu'il est homme, et qu'il ne peut pas disputer en jugement contre un plus puissant  que lui.

11 On discourt beaucoup, on se répand en beaucoup de paroles dans la dispute, et ce n'est que vanité.

 

CHAPITRE VII

 

Bonne réputation. Utilité des corrections. Avantage de la sagesse. Point de juste qui ne pèche. Négliger les discours des hommes. Femme dangereuse.

 

1 Qu'est-il nécessaire à un homme de rechercher ce qui est au-dessus de lui, lui qui ignore ce qui lui est avantageux en sa vie pendant les jours qu'il est étranger sur la terre, et durant le temps qui passe comme l'ombre? Ou qui lui pourra découvrir ce qui doit être après lui sous le soleil?

2 La bonne réputation vaut mieux que les parfums précieux, et le jour de la mort que celui de la naissance.

3 Il vaut mieux aller à une maison de deuil qu'à une maison de festin; car dans celle-là on est averti de la fin de tous les hommes, et celui qui est vivant pense à ce qui lui doit arriver un jour.

4 La colère vaut mieux que les ris, parce que le coeur de celui qui pèche est corrigé par la tristesse qui paroit sur le visage.

5 Le coeur des sages est où se trouve la tristesse, et le coeur des insensés où se trouve la joie.

6 Il vaut mieux être repris par un homme sage, que séduit par les flatteries des insensés;

7 Car le rire de l'insensé est comme le bruit que font les épines lorsqu'elles brûlent sous un vase ; mais cela même est une vanité.

8 La calomnie trouble le sage, et elle abattra la fermeté de son coeur.

9 La fin d'un discours vaut mieux que le commencement. L'homme patient vaut mieux qu'un présomptueux.

10 Ne soyez point prompt à vous mettre en colère, parce que la colère repose dans le sein de l'insensé.

11 Ne dites point : D'où vient que les premiers temps ont été meilleurs que ceux d'aujourd'hui? car cette demande n'est pas sage.

12 La sagesse est plus utile avec les richesses, et elle sert davantage à ceux qui voient le soleil.

13 Car, comme la sagesse protége, l'argent protége aussi ; mais la science et la sagesse ont cela de plus, qu'elles donnent la vie à celui qui les possède.

14 Considérez les oeuvres de Dieu, et voyez que nul ne peut corriger celui qu'il méprise.

15 Jouissez des biens au jour heureux, et tenez-vous prêt pour le mauvais jour ; car Dieu a fait l'un comme l'autre, sans que l'homme ait aucun sujet de se plaindre de lui.

16 J'ai vu encore ceci pendant les jours de ma vanité : Le juste périt dans sa justice, et le méchant vit longtemps dans sa malice.

17 Ne soyez pas trop juste, et ne soyez pas plus sage qu'il n'est nécessaire, de peur que vous n'en deveniez stupide.

18 Ne vous affermissez pas dans les actions criminelles, et ne devenez pas insensé, de peur que vous ne mouriez avant votre temps.

19 Il est bon que vous souteniez le juste; mais aussi ne retirez pas votre main de celui qui ne l'est pas; car celui qui craint Dieu ne néglige rien.

20 La sagesse rend le sage plus fort que dix princes d'une ville ;

21 Car il n'y a point d'homme juste sur la terre qui fasse le bien et ne pèche point.

22 Que votre coeur ne se rende point attentif à toutes les paroles qui se disent, de peur que vous n'entendiez votre serviteur parler mal de vous;

23 Car vous savez en votre conscience que vous avez vous-même souvent parlé mal des autres.

24 J'ai tout fait pour acquérir la sagesse. J'ai dit en moi-même : Je deviendrai sage, et la sagesse s'est retirée loin de moi,

25 Encore beaucoup plus qu'elle n’étoit auparavant. O combien est grand sa profondeur! et qui la pourra sonder?

26 Mon esprit a porté sa lumière sur toutes choses, pour savoir, pour considérer, pour chercher la sagesse et les raisons de tout, et pour connoître la malice des insensés, et l'erreur des imprudents:

27 Et j'ai reconnu que la femme est plus amère que la mort, qu'elle est le filet des chasseurs, que son cœur est un rets, et que ses mains sont des chaînes. Celui qui est agréable à Dieu se sauvera d'elle ; mais le pécheur s'y trouvera pris.

28 Voici ce que j’ai trouvé, dit l'Ecclésiaste, après avoir comparé une chose avec une autre pour trouver une raison,

29 Que mon âme cherche encore sans l'avoir pu découvrir. Entre mille hommes, je n'en ai trouvé qu'un ; mais de toutes les femmes, je n'en ai pas trouvé une seule.

30 Ce que j'ai trouvé seulement, c'est que Dieu a créé l'homme droit et juste, et que l'homme s'est lui même embarrassé dans une infinité de questions. Qui est assez sage pour ceci? et  connoît l'éclaircissement de cette parole?

 

CHAPITRE VIII

 

Ne point s'éloigner des commandements de Dieu. Patience de Dieu. Afflictions des justes. Prospérité des méchants.

 

1 La sagesse de l'homme luit sur son visage, et le Tout-Puissant le lui change comme il lui plaît.

2 Pour moi, j'observe la bouche du roi, et les préceptes que Dieu a donnés avec serment.

3 Ne vous hâtez point de vous retirer de devant sa face, et ne persévérez point dans une oeuvre mauvaise, parce qu'il fera tout ce qu'il voudra.

4 Sa parole est pleine de puissance, et nul ne lui peut dire : Pourquoi faites-vous ainsi?

5 Celui qui garde le précepte ne ressentira aucun mal. Le coeur du sage sait ce qu'il doit répondre, et quand il est temps de le faire.

6 Toutes choses ont leur temps et leurs moments favorables, et c'est une grande misère à l'homme

7 De ce qu'il ignore le passé, et de ce qu'il ne peut avoir aucune nouvelle de l'avenir.

8 Il n'est pas au pouvoir de l'homme d'empêcher que l'âme ne quitte le corps; il n'a point de puissance sur le jour de la mort; il ne peut avoir de trêve dans la guerre qui le menace; et l'impiété ne sauvera point l'impie.

9 J'ai considéré toutes ces choses, et j'ai appliqué mon coeur à discerner tout ce qui se fait sous le soleil. Un homme quelquefois en domine un autre pour son propre malheur.

10 J'ai vu des impies ensevelis, qui lors même qu'ils vivoient étoient dans le lieu saint, et qui étoient loués dans la cité comme si leurs oeuvres eussent été justes. Mais cela même est une vanité.

11 Car parce que la sentence ne se prononce pas sitôt contre les méchants, les enfants des hommes commettent le crime sans aucune crainte.

12 Mais néanmoins cette patience même avec laquelle le pécheur est souffert après avoir cent fois commis des crimes, m'a fait connoître que ceux qui craignent Dieu et qui respectent sa face seront heureux.

13 Que les méchants ne réussissent point, que les jours de leur vie ne soient pas longs, et que ceux qui ne craignent point la face du Seigneur passent comme l'ombre.

14 Il se trouve encore une autre vanité sous le soleil: il y a des justes à qui les malheurs arrivent comme s'ils avoient fait les actions des méchants; et il y a des méchants qui vivent dans l'assurance comme s'ils avoient fait les oeuvres des justes. Mais je crois que cela est encore une très-grande vanité.

15 C'est ce qui m'a porté à louer la joie et le repos ; j'ai cru que le bien que l'on pouvoit avoir sous le soleil étoit de manger, de boire, et de se réjouir, et que l'homme n'emportoit que cela avec lui de tout le travail qu'il avoit enduré en sa vie, pendant les jours que Dieu lui a donnés sous le soleil.

10 J'ai appliqué mon coeur pour connoître la sagesse, et pour remarquer cette dissipation de l'esprit des hommes qui sont sui la terre. Tel se trouve parmi eux qui ne dort et ne repose ni jour ni nuit.

17 Et J'ai reconnu que l'homme ne peut trouver aucune raison de toutes les oeuvres de Dieu qui se font sous le soleil ; et que plus il s'effor cera de la découvrir moins il la trouvera; quand le sage même dirait qu'il a cette connoissance, il ne la pourra trouver.

 

CHAPITRE IX

 

Nul ne sait s'il est digne d'amour ou de haine. Egale condition des bons et des méchants en ce monde. Faire le bien tandis qu'on le peut. Sagesse du pauvre méprisée.

 

1 J'ai agité toutes ces choses dans mon coeur, et je me suis mis en peine d'en trouver la raison. Il y a des justes et des sages, et leurs oeuvres sont dans la main de Dieu ; et néanmoins l'homme ne sait s'il est digne d'amour ou de haine.

2 Mais tout est réservé pour l'avenir et demeure ici incertain, parce que tout arrive également au juste et à l'injuste, au bon et au méchant, au pur et à l'impur, à celui qui immole des victimes et à celui qui méprise les sacrifices. L'innocent est traité comme le pécheur et le parjure comme celui qui jure dans la vérité.

3 C'est là ce qu'il y a de plus fâcheux dans tout ce qui se passe sous le soleil, de ce que tout arrive de même à tous. De là vient que les coeurs des enfants des hommes sont remplis de malice et de mépris pendant leur vie, et après cela ils seront mis entre les morts.

4 Il n'y a personne qui vive toujours, ni qui ait même cette espérance ; un chien vivant vaut mieux qu'un lion mort.

5 Car ceux qui sont en vie savent qu'ils doivent mourir ; mais les morts ne connoissent plus rien, et il ne leur reste plus de récompense, parce que leur mémoire est ensevelie dans l’oubli.

6 L'amour, la haine, et l'envie, ont péri avec eux, et ils n'ont plus de part à ce siècle, ni à tout ce qui se passe sous le soleil.

7 Allez donc, et mangez votre pain avec joie; buvez votre vin avec allégresse, parce que vos oeuvres sont agréables à Dieu.

8 Que vos vêtements soient blancs en tout temps; et que l'huile ne manque point à votre tête.

9 Jouissez de la vie avec la femme que vous aimez, pendant tous les jours de votre vie passagère, qui vous ont été donnés sous le soleil pendant tout le temps de votre vanité ; car

c'est là votre partage dans la vie et dans le travail qui vous occupe sous le soleil.

10 Faites promptement tout ce que votre main pourra faire, parce qu'il n'y aura plus ni oeuvre, ni raison, ni sagesse, ni science dans le tombeau où vous courez.

11 J'ai tourné mes pensées ailleurs, et j'ai vu que sous le soleil, le prix de la course n'est point pour ceux qui sont les plus légers à la course, ni la guerre pour les plus vaillants, ni le pain pour les plus sages, ni les richesses pour les plus habiles, ni la faveur pour les meilleurs ouvriers ; mais que tout se fait par rencontre et à l'aventure.

12 L'homme ignore quelle sera sa fin ; et comme les poissons sont pris à l'hameçon, et les oiseaux au filet. ainsi les hommes se trouvent surpris, par l'adversité, lorsque tout d'un coup elle fond sur eux.

13 J'ai vu aussi sous le soleil une action qui m'a paru un effet d'une très-grande sagesse :

14 Une ville fort petite, où il y avoit peu de monde; un grand roi est venu pour la prendre, il l'a investie il a bâti des forts tout à l'entour, et l'a assiégée de toutes parts.

15 Il s'est trouvé dans ses murs un homme pauvre, mais sage, qui a délivré la ville par sa sagesse; et après cela nul ne s'est plus souvenu de cet homme pauvre.

16 Je disois donc alors que la sagesse est meilleure que la force. Comment donc la sagesse du pauvre a-t-elle été méprisée, et comment ses paroles n'ont-elles point été écoutées?

17 Les paroles des sages s'entendent dans le repos. plus que les cris du prince parmi les insensés.

18 La sagesse vaut mieux que les armes des gens de guerre ; et celui qui pèche en une chose perdra de grands biens.

 

CHAPITRE X

 

Suites funestes de l'imprudence. Imprudents et esclaves élevés en dignité. Caractère du médisant. Roi enfant. Princes débauchés. Ne point médire du roi.

 

1 Les mouches qui meurent dans le parfum en gâtent la bonne odeur ; ainsi une imprudence légère et de peu de durée l'emporte sur la sagesse et la gloire.

2 Le coeur du sage est dans sa main droite, et le coeur de l'insensé est dans sa main gauche.

3 L'imprudent même qui marche dans sa voie croit tous les autres insensés comme il l'est lui-même.

4 Si l'esprit de celui qui a la puissance s'élève sur vous, ne quittez point votre place, parce que les remèdes qu'on vous appliquera vous guériront des plus grands péchés.

5 Il y a un mal que j'ai vu sous le soleil, qui semble venir de l'erreur du prince :

6 L'imprudent élevé dans une dignité sublime, et les riches assis en bas.

7 J'ai vu les esclaves à cheval, et les princes marchant à pied comme des esclaves.

8 Qui creuse la fosse y tombera ; et qui rompt la haie sera mordu du serpent.

9 Qui transporte les pierres en sera meurtri ; et qui fend le bois en sera blessé.

10 Si le fer s'émousse, et qu'après avoir été émoussé il se rebrousse encore, on aura bien de la peine à l'aiguiser; ainsi la sagesse ne s'acquiert que par un long travail.

11 Celui qui médit en secret est comme un serpent qui mord sans faire de bruit.

12 Les paroles qui sortent de la bouche du sage sont pleines de grâce; les lèvres de l'insensé le feront tomber dans le précipice;

13 Ses premières paroles sont une imprudence, et les dernières sont une erreur pernicieuse.

14 L'insensé se répand en paroles. L'homme ignore ce qui a été avant lui; et qui lui pourra découvrir ce qui doit être après lui?

15 Le travail des insensés les accablera, parce qu'ils ne savent comment il faut aller à la ville.

16 Malheur à toi, terre, dont le roi est un enfant, et dont les princes mangent dès le matin.

17 Heureuse est la terre dont le roi est d'une race illustre, et dont les princes ne mangent qu'au temps qu'il faut, pour se nourrir, et non pour satisfaire la sensualité.

18 La charpente du toit se gâtera peu à peu par la paresse, et les mains lâches seront cause qu'il pleuvra partout dans la maison.

19 Les hommes emploient le pain et le vin pour rire et se divertir, et pour passer leur vie en festins ; et toutes choses obéissent à l'argent.

20 Ne parlez point mal du roi dans votre pensée, et ne médisez point du riche dans le secret de votre chambre, parce que les oiseaux mêmes du ciel rapporteront vos paroles, et ceux qui ont des ailes publieront ce que vous aurez dit.

 

CHAPITRE XI

 

Faire l'aumône. Œuvres de Dieu inconnues. Avoir sans cesse devant les yeux le jugement de Dieu Vanité de la sagesse.

 

1 Répandez votre pain sur les eaux qui passent, parce que vous le trouverez après un long temps.

2 Faites-en part à sept et à huit personnes, parce que vous ignorez le mal qui doit venir sur la terre.

3 Lorsque les nuées se seront remplies, elles répandront la pluie sur la terre. Si l'arbre tombe au midi ou au septentrion, en quelque lieu qu'il soit tombé il y demeurera.

4 Celui qui observe les vents ne sème point ; et celui qui considère les nuées ne moissonnera jamais.

5 Comme vous ignorez par où l'âme vient, et de quelle manière les os se lient dans les entrailles d'une femme enceinte ; ainsi vous ne connoissez point les oeuvres de Dieu, qui est le créateur de toutes choses.

6 Semez votre grain dès le matin, et que le soir votre main ne cesse point de semer, parce que vous ne savez lequel des deux lèvera plus tôt, ou celui-ci, ou celui-là ; que si l'un et l'autre lèvent, ce sera encore mieux.

7 La lumière est douce, et l'oeil se plaît à voir le soleil.

8 Si un homme vit beaucoup d'années, et qu'il se réjouisse dans tout ce temps-là, il doit se souvenir de ce temps de ténèbres, et de cette multitude de jours, qui, étant venue, convaincront de vanité tout le passé.

9 Réjouissez-vous donc, jeune homme, dans votre jeunesse; que votre coeur soit dans l'allégresse pendant votre premier âge ; marchez selon les voies de votre coeur et selon les regards de vos yeux, et sachez que Dieu vous fera rendre compte en son jugement de toutes ces choses.

10 Bannissez la colère de votre coeur ; éloignez le mal de votre chair; car la jeunesse et le plaisir ne sont que vanité.

 

CHAPITRE XII

 

Ne pas attendre le vieillesse pour servir le Seigneur. Énigme de la vieillesse. Vanité des choses du monde. Craindre Dieu et observer ses commandements.

 

1 Souvenez-vous de votre Créateur pendant les jours de votre jeunesse, avant que le temps de l'affliction soit arrivé, et que vous approchiez des années dont vous direz : Ce temps me déplaît ;

2 Avant que le soleil, la lumière, la lune, et les étoiles s'obscurcissent, et que les nuées retournent après la pluie;

3 Lorsque les gardes de la maison commenceront à trembler, que les hommes les plus forts s'ébranleront, que celles qui avoient accoutumé de moudre seront en petit nombre, et deviendront oisives, et que ceux qui regardoient par les ouvertures seront couverts de ténèbres ;

4 Quand on fermera les portes de la rue, quand la voix de celle qui avoit accoutumé de moudre sera basse, qu'on se lèvera au chant de l'oiseau, et que les filles de l'harmonie deviendront sourdes.

5 Ils auront même peur des lieux élevés, et ils craindront en chemin. L'amandier fleurira, la sauterelle s'engraissera, et les câpres se disperseront, parce que l'homme s'en ira dans la maison de son éternité, et qu'on marchera en pleurant autour des places.

6 Avant que la chaîne d'argent soit rompue, que la bandelette d'or se retire, que la cruche se brise sur la fontaine, et que la roue se rompt sur la citerne,

7 Que la poussière rentre en la terre d'où elle avait été tirée, et que l'esprit retourne à Dieu, qui l'avoit donné.

8 Vanité des vanités, dit l'Ecclésiaste, tout est vanité.

9 L'Ecclésiaste étant très-sage enseigna le peuple ; il publia ce qu'il avoit fait; et dans cette étude il composa plusieurs paraboles.

10 Il rechercha des paroles utiles, et il écrivit des discours pleins de droiture et de vérité.

11 Les paroles des sages sont comme des aiguillons, et comme des clous enfoncés profondément, que le pasteur unique nous a donnés par le conseil et la sagesse des maîtres.

12 Ne recherchez rien davantage, mon fils. Il n'y a point de fin à multiplier les livres ; et la continuelle méditation de l'esprit afflige le corps.

13 Écoutons tous ensemble la fin de tout ce discours : Craignez Dieu, et observez ses commandements; car c'est là le tout de l'homme ;

14 Et Dieu fera rendre compte, en son jugement, de toutes les fautes, et de tout le bien et le mal qu'on aura fait.

 

FIN DU PREMIER VOLUME